Belgique

À Schaerbeek, la majorité se délite: “Les choses ont commencé à être plus difficiles quand Bernard Clerfayt a décidé de devenir ministre”

guillement

“Toute la commune se demande qui est le bourgmestre : Cécile Jodogne ou Bernard Clerfayt ? Dans le journal communal, on présente toujours l’équipe du bourgmestre empêché. Et M. Clerfayt assiste encore aux conseils communaux. Il fait penser au spectre d’Hamlet.”

Être ou ne pas être bourgmestre, c’est la question shakespearienne, transposée à Bernard Clerfayt, qui agite de nombreuses conversations schaerbeekoises.

Bernard Clerfayt maintient le suspense

Après avoir déclaré en juin qu’ilne resterait peut-être pas ministre jusqu’au 21 mai 2024”, certains imaginaient déjà Bernard Clerfayt effectuer son retour en ce début d’année. Il maintient le suspense. “Je reste maître de mon calendrier”, assure l’intéressé.

”Dans une équipe, il faut toujours un leader, un meneur de jeu qui sait où aller”, assure Sophie Querton, présidente du CPAS. C’était Bernard Clerfayt. Les choses ont commencé à être plus difficiles quand il a fait le choix d’aller à la région (comme ministre de l’Emploi, NdlR) en 2019. La majorité en subit les conséquences. Il n’y a plus de leader au-dessus de la mêlée et chacun voit d’abord ses intérêts. Cécile Jodogne bosse nuit et jour mais elle a hérité d’une situation empoisonnée.

Bernard Clerfayt aura toutefois fort à faire pour conserver l’écharpe mayorale en 2024. Les effets de la proposition d’interdire l’abattage sans étourdissement, formulé par son parti, devront être analysés posément, de même que les conséquences des contestations à Good Move.

Car, bien que très populaire dans les urnes (7.927 en 2018), Bernard Clerfayt est sorti affaibli des dernières élections perdant deux sièges par rapport au précédent scrutin.

La situation s’est rapidement corsée lorsque deux conseillers communaux ont quitté la majorité. “Aujourd’hui, on se retrouve avec 25 sièges sur 47. Si on retire Michel De Herde, cela fait 24. Avec deux absents lors d’un conseil communal, on est dans l’embarras dès que nous avons des questions sensibles à traiter, comme Good move ou le stationnement. Cela provoque des tiraillements dans la majorité, fragile et diverse”, reconnaît Marc Weber, chef de cabinet de Cécile Jodogne.

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La majorité se composait initialement d’Écolo (10 sièges), emmenée par le 1er échevin Vincent Vanhalewyn, tandis que la liste du bourgmestre (17 sièges) comprend des élus de tendance libérale mais non affiliés au MR, et des élus Défi dont certains, comme Sadik Koksal (Défi), sont anti-Good Move.

”Écolo, en perte de vitesse dans toute la Région, craint d’être éjecté partout, reprend le chef de cabinet de Cécile Jodogne. Dans l’opposition, les socialistes ont peur de se faire manger par le PTB. Il y a une volonté très forte d’abattre Bernard Clerfayt et Cécile Jodogne, un formidable soldat qui tient très bien la baraque. Mais qui n’a pas été élue comme bourgmestre… Quant au MR, pratiquement inexistant à Schaerbeek, il cherche quelqu’un pour relancer sa marque.

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Le MR tente une OPA

David Leisterh a fait de la cité des ânes “une absolue priorité pour 2024”, espérant convaincre Bernard Clerfayt de les embarquer dans la prochaine majorité. Le président de la régionale MR de Bruxelles compte beaucoup sur l’arrivée de la Schaerbeekoise Hadja Lahbib, pressentie pour pousser la liste communale. Il a également relancé des contacts pour tenter de recruter les libéraux de la majorité. Sophie Querton pourrait d’ailleurs rejoindre prochainement le MR. “Ce n’est pas fait. Mais s’il y a un moment où le MR peut espérer récupérer la commune, c’est bien en 2024”, assure la présidente du CPAS.

”Le libéralisme schaerbeekois vit déjà à travers ma liste. J’entretiens de bons contacts avec Hadja Lahbib mais elle ne va pas résoudre à elle seule tous les problèmes de la section locale du MR”, assène Bernard Clerfayt.

Certains évoquent aussi la possible alliance entre la liste du bourgmestre et le PS. Les socialistes ne se sont jamais vraiment remis de la défaite de Laurette Onkelinx face à Bernard Clerfayt, en 2012. Les difficultés rencontrées par Écolo sous cette législature pourraient toutefois leur ouvrir une fenêtre d’opportunité. La bataille de 2024 sera rude. Elle l’est déjà.