High-tech

MWC : Quand la guerre et les tensions internationales s’invitent au salon de “l’innovation”

Sur place, le salon a donc clairement plus des airs de meeting géant pour professionnels des télécoms que de stands pour le grand public.

Le mot d’ordre cette année ? Les “green technologies”. Alors que tous les objets gourmands en métaux et matériaux posent des questions de durabilité, les marques insistent sur leurs équipements moins énergivores, plus efficaces, etc. L’un des exposants nous avoue d’ailleurs, en off, que l’objectif est de pouvoir vendre du matériel innovant et moins consommateur d’énergie chaque année. De là à faire de l’obsolescence programmée ? “Non, mais nous devons innover toujours plus et convaincre nos clients de faire une mise à jour de leur matériel”, nous dit-on.

Huawei face à ses détracteurs

D’ailleurs, dans cette course à l’innovation, le géant chinois Huawei, le plus important exposant du salon, met en avant tous ses équipements, dont les antennes réseau qui n’utilisent plus de câbles mais des structures métalliques à la technologie “top secret” en remplacement – prendre des photos de l’intérieur de ces installations est d’ailleurs strictement interdit sur le stand -, ce qui permet d’alléger grandement les infrastructures. Les solutions de stockage de données (data centers) de nouvelle génération sont également à l’honneur.

Le MWC a-t-il de l’intérêt pour les entreprises belges ?

Nous pouvons utiliser la technologie pour aider les autres secteurs à réduire leur consommation énergétique et réduire leurs émissions de gaz à effet de serre”, affirme d’ailleurs Victor Qian, CEO de Huawei Belgium&Luxembourg.

Si l’argument de la technologie au service de la durabilité est souvent mis en avant par les constructeurs et que les nouvelles antennes 5G, par exemple, réduisent effectivement la consommation énergétique par mégabit transporté (et peuvent d’ailleurs s’éteindre lors d’utilisation en chute la nuit ou autres), il reste admis que la consommation de données va continuer d’exploser, en particulier si le métavers et l’internet des objets (IoT) continuent de se développer. Certaines projections avancent une consommation décuplée dans les cinq ans.

Pour Huawei, difficile de parler de neutralité carbone totale, mais face à la consommation grandissante, il faut agir et ne pas simplement fermer les yeux sur le problème, nous dit-on. “L’Europe représente notre deuxième plus gros marché après la Chine, c’est pour cela que nous continuons à investir fortement dans nos centres de R&D (Recherche et développement, NdlR) ”, renchérit Victor Qian.

Et si le lobbying américain face aux entreprises chinoises – qui s’était particulièrement renforcé avec Trump lors de la guerre commerciale avec la Chine mais s’est prolongé avec Biden – a de l’écho en Europe, comme ce que l’on constate actuellement avec Huawei ou encore TikTok, le dirigeant de Huawei le regrette et appelle à ce que n’importe qui vienne tester le matériel de l’entreprise pour donner des preuves aux accusations d’espionnage émises par les États-Unis. Un observateur du secteur issu d’un centre de recherche belge présent sur place nous dit, également en off, que mieux vaut “ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier en termes d’équipements”, mais que lorsque des entreprises américaines ou israéliennes ont été prises la main dans le sac au niveau espionnage, le lobbying envers celles-ci n’était pas de la même ampleur.

Quid des entreprises russes ?

D’ailleurs, comment Kaspersky, le spécialiste russe de la cybersécurité, traverse la situation actuelle, alors que les organismes russes sont souvent visés par des embargos depuis l’invasion de l’Ukraine ?

Les opérations commerciales de Kaspersky restent stables. Nous confirmons que les employés, la direction et les bénéficiaires de l’entreprise ne figurent pas directement ou personnellement sur les listes de sanctions de l’Union européenne”, nous dit-on du côté de ce spécialiste.

“Nous employons environ 4 500 personnes, dont près de la moitié sont des chercheurs en cybersécurité, à travers le monde”, nous explique Marc Rivero, chercheur au Global Research and Analysis Team de l’entreprise. L’homme confirme par ailleurs s’intéresser surtout aux aspects techniques mais ne se préoccupe que peu des aspects commerciaux, sur lesquels il n’a qu’une vision superficielle.

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Mais selon l’entreprise, seuls les contrats d’une valeur dépassant 140 000 euros pour les marchés publics pour les gouvernements centraux et dépassant 215 000 euros pour les autorités plus locales sont concernés par les sanctions, ce qui représenterait que très peu de contrats pour Kaspersky. Si l’entreprise évite de tomber dans le commentaire politique lié à la guerre en Ukraine, elle met d’ailleurs en avant son visage international, pour éviter d’être jeté avec l’eau sale du bain, pourrait-on dire.

Les solutions Kaspersky sont largement respectées par les partenaires et les clients du secteur public et contribuent largement à la protection des organisations et des sociétés européennes contre les cybermenaces. Kaspersky […] coopère avec de nombreuses organisations nationales et internationales, dont Interpol, le Conseil de l’Europe, etc. ”, précise encore l’entreprise russe qui dispose de plusieurs implantations dans le monde.