France

Réforme des retraites : Malgré la validation du Conseil constitutionnel, l’opposition ne rend pas (encore) les armes

L’exécutif comme l’opposition attendaient impatiemment la décision du Conseil Constitutionnel sur la réforme des retraites. Après trois mois de crise politique et sociale, les Sages ont bien validé l’essentiel du projet de loi, ce vendredi en fin d’après-midi, ne censurant que des dispositions secondaires du texte. La mesure emblématique, le report progressif de l’âge légal de départ en retraite à 64 ans, aura donc force de loi dès qu’Emmanuel Macron aura promulgué la réforme. « Le texte arrive à la fin de son processus démocratique. Ce soir, il n’y a ni vainqueur, ni vaincu », a réagi la Première ministre Elisabeth Borne sur Twitter, alors que le référendum d’initiative partagée (RIP), déposée par la gauche, a également été rejeté. Malgré ces « coups durs », l’opposition n’entend pas baisser les bras.

« La décision du Conseil constitutionnel était courue d’avance, et ne change absolument rien. Le projet de loi est légal, mais il reste illégitime », balaie Antoine Léaument, député LFI. Reste à savoir si cette annonce des Sages relancera le mouvement ou finira, au contraire, de l’achever. Selon le ministère de l’Intérieur, 380.000 manifestants ont défilé jeudi en France (1,5 million selon la CGT), pour la douzième journée de mobilisation depuis janvier. C’est le deuxième plus faible score depuis le début du mouvement. « Il peut y avoir de la fatigue, des questions d’argent liées aux grèves… C’est une guerre d’usure, savoir qui cédera le premier… Mais je ne crois pas que la colère qui s’est exprimée ces derniers mois puisse s’éteindre », veut croire l’élu de l’Essonne.

Le 1er-Mai ciblé

Dans les sondages d’opinion, l’opposition au projet de loi du gouvernement reste intacte. Et les syndicats, qui ont présenté jusqu’ici un front uni contre cette réforme, ont fait savoir qu’ils entendaient aussi continuer le « combat », ciblant notamment la date du 1er-Mai pour réclamer le retrait du texte ou la non-application du recul de l’âge à 64 ans. « Ces annonces sont évidemment des coups durs pour l’opposition au texte. L’espoir d’un projet retoqué, qui aurait contraint Emmanuel Macron à recevoir les syndicats à la table des négociations en position de force, n’existe plus », indique Luc Rouban, chercheur au CNRS et au Cevipof.

« L’une des possibilités, désormais, c’est que le mouvement se durcisse. Mais ce risque de radicalisation, et de possibles violences, pourrait jouer dans le sens du gouvernement. Il faudra également voir si dans les jours à venir, l’intersyndicale n’explose pas en vol », ajoute Luc Rouban. Cette semaine, le patron de la CFDT Laurent Berger semblait déjà émettre des doutes sur la poursuite des mobilisations sur le long terme. « Il est clair que la CFDT ne fera pas des manifestations pendant six mois sur cette réforme », disait-il sur le plateau de LCI, estimant toutefois qu’« on n’en aura pas fini de l’épisode des retraites ».

Le 3 mai attendu

Au sein du camp présidentiel, bien entendu, on mise désormais sur l’essoufflement. L’exécutif espère vite clore le chapitre, en ouvrant d’autres chantiers sur les conditions de vie et de rémunération au travail. Emmanuel Macron a ainsi invité les représentants syndicaux et patronaux mardi prochain à l’Elysée pour ouvrir « le début d’un cycle » nouveau.

Deux stratégies différentes désormais dans l’opposition politique. A gauche, on mise ses pions sur la mobilisation et la seconde demande de RIP, déposée ultérieurement, qui fera l’objet d’une décision du Conseil constitutionnel le 3 mai prochain. « La lutte continue et doit rassembler ses forces », a tweeté Jean-Luc Mélenchon.

Du côté du Rassemblement national, on pense déjà aux urnes. « Le sort politique de la réforme des retraites n’est pas scellé. Le peuple ayant toujours le dernier mot, il lui appartiendra de préparer l’alternance qui reviendra sur cette réforme inutile et injuste. »