France

« Nous ne sommes pas des pilleurs de trésors »… Les détectoristes défendent leur passion

« Tu entends ce son strident ? C’est sûrement de l’aluminium. Le son est plus grave quand c’est du fer. » Le casque vissé sur les oreilles, Étienne écoute religieusement les sons captés par le disque de son détecteur de métaux. Avec ses deux collègues, ce retraité breton profite, en ce mois d’avril, d’une belle journée ensoleillée et de la marée basse pour s’adonner à sa passion sur la plage du Minihic, à Saint-Malo. « On verra si on trouve quelque chose, mais ce n’est pas le plus important, assure-t-il. On en profite surtout pour prendre un bol d’air, se vider la tête et partager un moment convivial entre copains. »

Comme eux, environ 120.000 personnes manient régulièrement la « poêle à frire » en France. Des détectoristes, ou UDM (utilisateurs de détecteurs de métaux), qui suscitent toujours la curiosité sur les plages ou dans les champs. Mais ils sont aussi dans le collimateur des archéologues, qui les accusent de piller certains sites et de se livrer à un trafic de pièces de monnaies anciennes et autres objets historiques.

« C’est rare de trouver des choses intéressantes »

Président de la Fédération française de détection de métaux, qui compte environ 2.000 adhérents, Marc Méreaux ne cache pas que certaines personnes mal intentionnées pratiquent cette activité, seulement motivées par l’appât du gain. « Il y a des brebis galeuses, comme partout dans la société, indique cet ancien major de la gendarmerie. Mais nous ne sommes pas des pilleurs de trésors. Ces gens ne sont qu’une minorité et ils font du tort à toute la communauté. »

Pour les détectoristes, le trésor se résume bien souvent à des déchets métalliques.
Pour les détectoristes, le trésor se résume bien souvent à des déchets métalliques. – J. Gicquel / 20 Minutes

Car à les entendre, les détectoristes ne voient pas leur passion comme une chasse au trésor effrénée. « Il ne faut pas croire mais c’est extrêmement rare de trouver des choses intéressantes, indique Jean-Paul, collègue d’Étienne. Presque tout le temps, ce sont des merdouilles que l’on trouve, des déchets comme des boîtes métalliques, des capsules ou des languettes de canettes en aluminium. » Ces prospecteurs de métaux affirment d’ailleurs qu’ils jouent un rôle important dans la dépollution des sols. « Si on sort une fois par semaine, on peut facilement ramasser une centaine de kilos de déchets par an. »

Une pratique très réglementée

Il arrive parfois quand même que les UDM tombent sur autre chose que des merdouilles. Des particuliers les sollicitent ainsi pour retrouver un bijou ou un objet de valeur égaré dans un jardin ou sur une plage. « J’ai retrouvé une chevalière en or une fois, à Saint-Malo, confie Etienne. Les gens étaient aux anges et cela a suffi à mon bonheur. Car je ne fais pas ça pour l’argent mais pour le plaisir de retrouver des choses perdues. » Les trois passionnés sont aussi régulièrement appelés par des agriculteurs qui ont perdu un socle de charrue ou des pièces de leur tracteur. « On intervient aussi pour enlever des bouts de fil de fer pour éviter que les animaux ne se blessent », indique Jean-Paul.

Ces passionnés défendent donc bec et ongles l’intérêt de leur loisir, trop souvent stigmatisé selon eux. D’autant que la pratique est très réglementée. Un peu trop, d’ailleurs, à leurs yeux. Depuis 2016 et la modification du Code du patrimoine, la législation s’est en effet encore durcie. « On nous applique les mêmes règles que pour l’archéologie alors que c’est un loisir », se défend Marc Méreaux.

Le président de la fédération plaide pour un modèle comme au Royaume-Uni, au Danemark ou en Finlande, où la pratique est pleinement reconnue. « On aimerait pouvoir déclarer les objets que l’on trouve mais on ne peut pas le faire car l’utilisation d’un détecteur de métaux fait qu’ils n’ont pas été découverts de manière fortuite, souligne Marc Méreaux. On risque même d’être poursuivi si on déclare un objet trouvé, donc ça dissuade les gens de le faire. C’est une perte énorme pour le patrimoine. » « En gros, c’est légal si on ne trouve rien mais illégal dès que l’on trouve quelque chose », résume Jean-Paul.