France

Les Grecs sans illusion avant les élections législatives dimanche

L’ancien Premier ministre contre l’actuel. L’affiche au sommet des élections législatives en Grèce, qui se tiennent dimanche, pourrait tout avoir d’un blockbuster politique. Mais la passion est absente chez les électeurs. « Je n’espère rien de cette élection. Quel que soit le vainqueur, nos vies ne changeront pas le lendemain » du scrutin, résume Nikos Kalaitzidis, pompiste à Thessalonique. A 32 ans, il se dit « déçu par les partis au pouvoir ».

En campagne, le chef du gouvernement sortant et leader de Nouvelle-démocratie, Kyriakos Mitsotakis, n’a cessé de mettre en avant son bilan économique : retour de la croissance (5,9 % en 2022), envolée du tourisme et baisse du chômage après les années de crise et de plans de sauvetage au prix de lourds sacrifices pour de nombreux Grecs. Mais la hausse du coût de la vie et l’envol des prix de l’énergie figurent en tête des préoccupations d’électeurs éprouvés par une inflation qui a frôlé les 10 % en 2022.

Explosion du coût de la vie

A Patras, le propriétaire d’une taverne, Kyriakos Bazaroglou, 50 ans, fait ses comptes. « En 2019 un kebab me coûtait 45 cents (à fabriquer) et maintenant il coûte 1,70 euro. Je ne peux pas le vendre 4 euros » aux clients, détaille-t-il. C’est dans ce même grand port du Péloponnèse que le dirigeant de la gauche Syriza et ancien Premier ministre (2015-2019), Alexis Tsipras, tenait vendredi un ultime rassemblement de campagne avant les élections législatives de dimanche.

Devant ses troupes qui agitent des drapeaux rouges ou jaunes, il prédit la fin du « cauchemar » enduré durant les quatre années du mandat du Premier ministre de droite sortant. Mais à quelques encâblures du rassemblement, l’opticien Vassilis Kalyvas, 55 ans, ne se fait guère d’illusions malgré son souhait de voir un gouvernement qui « défende les intérêts du peuple. Et aide l’économie à croître ». « D’après ce que je vois, ce n’est pas le cas », déplore-t-il. « A en juger par les conversations, les gens sont déçus » par la gauche et la droite, assure-t-il.

Abstention record en vue

Chrysa Papadimitriou, une chômeuse de 43 ans, constate d’ailleurs « de l’indifférence » chez la plupart des électeurs, peu intéressés par une campagne que beaucoup d’observateurs jugent atone. « Vous n’entendez plus de discussions politiques comme par le passé et la plupart des gens évitent de parler ouvertement de celui pour qui ils vont voter », assure-t-elle.

A Athènes, Stavroula, 31 ans, qui ne souhaite pas donner son nom de famille, a quant à elle décidé que dimanche, elle n’effectuerait pas le voyage dans sa ville natale du Péloponnèse pour voter. « A quoi ça sert ? Les politiciens nous amadouent avec des promesses qu’ils ne tiendront pas ». En 2019, le taux d’abstention s’élevait déjà à 42 %. Seule une personne sur quatre âgée de 17 à 24 ans avait voté, selon Maria Karaklioumi, analyste politique pour la société de sondage RASS. Cette fois, l’abstention pourrait même s’avérer encore plus forte parmi les 440.000 jeunes appelés pour la première fois aux urnes.

Le quotidien de centre-droit Ta Nea a d’ailleurs mis en garde samedi contre les dangers de l’abstention. « Quiconque ne vote pas ne peut pas avoir d’opinion sur la façon dont les partis remplissent leur rôle », juge le journal dans un éditorial.

Alors que cette campagne, anticipée suite à une catastrophe ferroviaire fin février, s’est déroulée dans l’ombre de celle du grand voisin truc avec lequel la Grèce entretient régulièrement des relations acrimonieuses, Ta Nea relève samedi : « Si nous avons quelque chose à envier aux élections en Turquie, c’est leur très forte participation ».