France

JO de Paris 2024 : C’est quoi cette formation « allégée » d’agent de sécurité privée ?

Recruter entre 20 et 30.000 agents de sécurité privée dans un secteur en tension où il manque à la louche déjà 20.000 personnels pour assurer les missions courantes. Le défi est de taille pour l’organisation des JO de Paris en 2024, d’autant que le fiasco de la finale de la Ligue des champions fin mai au Stade de France, est une plaie toujours béante. « Il va falloir mettre les bouchées doubles car l’enjeu est de recruter des milliers de personnes », admet Guillaume Vuilletet, député du Val-d’Oise (Parti écologiste) et rapporteur sur le projet de loi relatif aux JO de 2024.

Pour y parvenir, le Parlement a validé une « expérimentation législative jusqu’au 31 décembre 2024 », qui permet notamment de dispenser une formation allégée d’agent de sécurité privée, 106 heures au lieu des 176 à 300 heures habituelles pour une telle certification. Un dispositif non négligeable pour les instances qui tentent de recruter par tous les moyens. En 106 heures, soit trois semaines de formation, vous pourrez donc prétendre à participer à l’aventure Paris-2024 en tant qu’agent de sécurité privée. L’offre est alléchante mais que contient-elle ? Comment apprendre ce métier, indispensable à la tenue d’un tel événement en si peu de temps ? 20 Minutes s’est penché plus spécifiquement sur cette formation adaptée.

Travailler uniquement dans la sécurité de l’événementiel

« La formation est réduite parce que les missions sont réduites, expose Cédric Paulin, secrétaire général du syndicat national patronal des entreprises de la sécurité privée. Avec cette certification de 106 heures, les postulants ne pourront que travailler dans la sécurité de l’événementiel, pas dans la grande distribution ou ailleurs ». En effet, une fois bouclées ces trois semaines de formation, la certification délivrée ne permet pas d’obtenir la carte professionnelle d’agent de sécurité privée et de faire partie totalement de cette profession qui compte aujourd’hui 180.000 professionnels. « Il manque 15 jours de formation pour être complet et ainsi pouvoir intervenir aussi sur un site industriel, dans la grande distribution, dans les sièges sociaux ou dans les usines », précise Cédric Paulin.

Ce dispositif temporaire a déjà été mis en place pour l’Euro de foot en 2016. Le CQP, certificat de qualification professionnelle, a été déposé en décembre par l’instance paritaire de la profession. « Aujourd’hui, 159 organismes sont agréés par la branche et les premières sessions de formation de 106 heures ont débuté le 29 mars », précise-t-il. L’occasion pour les premiers certifiés de se tester durant la Coupe du monde de rugby à partir de septembre ou de contribuer à sécuriser d’autres événements avant les JO. 

L’occasion aussi pour les organisateurs de Paris-2024 d’expérimenter certains scénarios et de mettre à l’épreuve les premières équipes. « L’enjeu est moindre sur un événement comme le Mondial de rugby en France car il n’y a pas de matchs tous les jours, c’est étalé sur un mois et sur toute la France. C’est somme toute un événementiel sportif classique avec surtout de la sécurité privée dans les stades, alors que les sites olympiques où potentiellement il faut des personnels entre 9 et 23 heures, ce n’est pas la même configuration en matière de sécurité et de planification. Pour les JO, il y a une concentration géographique, temporaire et temporelle très particulière », rappelle Cédric Paulin.

Trois axes principaux retenus

« On a enlevé dans la formation « traditionnelle » de cinq semaines tout ce qui n’était pas nécessaire par rapport à l’objet même de la mission ». Restent donc pour ces trois semaines, trois grands axes de formation : l’un juridique, le deuxième axé sur les contrôles d’accès, les filtrages et la palpation et le dernier sur la gestion des conflits. « Comment réagir quand il y a un problème est le cœur de métier de la sécurité privée, insiste Cédric Paulin. Il faut être particulièrement attentif à la gestuelle, à l’attitude corporelle, au langage ». A l’issue des 106 heures, les candidats passent un test pour valider la certification. « Sur la formation « complète » de cinq semaines, le taux de réussite est de 80 % », mentionne le secrétaire général du GES. Et ensuite, ces personnels, une fois certifiés et embauchés par des entreprises de sécurité privée, bénéficieront d’une « formation au poste et lieu spécifiques ».

Par exemple, la palpation ne se déroule pas de la même façon à l’entrée d’un stade ou à l’entrée du Louvre. Ce n’est ni le même public, ni le même flux, ni la même rapidité et les points d’attention ne sont pas les mêmes. Dans un stade, on met l’accent sur les objets dissimulés comme une bouteille d’alcool ou un fumigène avec des techniques particulières, au Louvre, non. Et puis, il y a une formation aux consignes : comprendre et appliquer une consigne, c’est une autre des bases du travail d’agent de sécurité privée. »

Il faut aussi prendre en compte qu’un agent de sécurité privée devra être accrédité pour travailler pendant les Jeux de Paris et pourra donc, selon le volet sécuritaire de la loi Jeux olympiques et paralympiques, faire l’objet d’une enquête administrative. Pour postuler à la formation allégée il faut être majeur et résident en France depuis au moins cinq ans. Ce module, qui ne nécessite aucun prérequis, est entièrement financé par Pôle emploi et rémunéré, et il donne droit à une prime de la région Île-de-France de 600 euros.