France

Fresque à Avignon : Quatre questions pour comprendre la polémique sur Lekto

Un Emmanuel Macron grimé en Hitler qui suscite de nombreuses réactions. Réalisée à Avignon, cette peinture remet son auteur, le graffeur Lekto, sur le devant de la scène médiatique. Ce n’est pas la première fois que l’artiste fait parler de lui. 20 Minutes fait le point la polémique née de sa dernière création.

C’est quoi cette fresque ?

L’œuvre, peinte sur le transformateur électrique du parking des Italiens, a été découverte lundi à Avignon, tout près de remparts de la ville. On y voit un Emmanuel Macron aux traits tirés et affublé d’une moustache hitlérienne figurée par l’inscription 49.3, article de loi auquel le gouvernement a eu recours à onze reprises pour faire passer ses textes de loi. Et notamment, dernièrement, le projet de réforme des retraites.

La fresque est accompagnée d’un « non merci » en lettres capitales de grandes dimensions, a laquelle a été ajoutée en contrebas : « Si jamais… Peinture satyrique ».

Qui est Lekto ?

Difficile de savoir qui se cache derrière ce pseudonyme puisque l’artiste reste discret, refusant de répondre aux sollicitations des médias. Ses fresques, pour la plupart, ont été découvertes à Avignon ou dans ses alentours. Son compte Instagram, créé en août 2020, laisse penser qu’il pourrait s’agir d’un jeune graffeur. Sur une publication Instagram datant du 23 juin 2021, on l’aperçoit dissimulé derrière ses genoux, aux côtés de trois autres jeunes gens, en train de partager apéritif « whisky coca » dans un salon.

De là à penser qu’il s’agit d’un étudiant ou d’un ancien diplômé de l’école d’art d’Avignon ? L’homme cultive le mystère. Outre ses qualités techniques de graffeur, l’intéressé a posté ce mardi midi une story enveloppée d’un fond de musique jazz (Hummin’ To Myself des Washboard Rhythm Kings) avec une seule image : celle du caricaturiste Honoré Daumier, décédé en 1879. Une référence suffisamment pointue pour penser qu’il a pu étudier ce personnage. Marseillais d’origine, Daumier a été condamné à six mois de prison en 1832 pour avoir caricaturé le roi Louis Philippe en Gargantua.

Quelles œuvres a-t-il réalisées ?

Au même endroit, en juin dernier, Lekto avait, à quelques jours du festival d’Avignon, caricaturé Jacques Attali en marionnettiste tirant les ficelles d’un Macron-pantin. L’intéressé avait porté plainte pour « injure publique » et « provocation à la haine et à discrimination raciale » et la Licra – ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme – s’était constituée partie civile.

Cette fresque « reprend tous les codes antisémites du début du siècle », estimait Cyril Bonan, l’avocat de Jacques Attali, auprès de France Bleu. L’audience, repoussée à trois reprises pour des raisons juridiques ou de représentation, doit se tenir le 14 septembre, selon La Provence.

Si cette peinture de Jacques Attali est celle qui fut la première à créer une réelle polémique, Lekto n’a pas réalisé que celle-là. Sur son compte Instagram, on peut voir un Coluche doté d’un costume et d’une écharpe d’élu, sur fond tricolore, accompagné de « Pour leur foutre au *** », un des slogans de l’humoriste, à l’époque où il s’était entré en campagne pour l’élection présidentielle. On découvre également Olivier Véran, ministre de la Santé, rempli de piqûres et affublé de la mention « Immunizey ». Une peinture qui tranche avec celle de Didier Raoult, effectuant le signe du rappeur Jul.

Visiblement coutumier des fresques critiquant le pouvoir actuel et fustigeant sa politique de lutte contre le Covid-19, le jeune homme s’en est également pris aux médias représentés par quatre « chiens de garde ». L’expression « les chiens de garde », fait référence au pamphlet de Paul Nizan, publié en 1932 et dirigé à l’époque contre certains philosophes. Une expression reprise par Serge Halimi dans un film documentaire et un livre, désignant, lui, certains médias.

Quelles sont les réactions publiques ?

La dernière peinture en date de Lekto n’est visiblement pas aux goûts des autorités locales et des représentants de l’Etat. « Sur demande de Joël Guin (DVD), et de Violaine Démaret, préfète de Vaucluse, les services du Grand Avignon sont mobilisés pour faire enlever dès que possible la nouvelle fresque de l’artiste Lekto », a indiqué lundi la communauté d’agglomération dans un communiqué.

Ce mardi, quelques réactions politiques se poursuivaient. Interrogé à ce propos sur BFM TV, Manuel Bompard, coordinateur de la France Insoumise, a défendu le « droit à la caricature » tandis que la journaliste Anne Sinclair s’en est indignée, estimant la fresque « abjecte ». Une œuvre qui a également fait dire à Pascal Praud, sur RTL, : « On est tous en danger ».

La ministre de l’égalité des Chances Isabelle Rome, a quant à elle réagi sur Twitter : «  Ce dessin me donne la nausée ».