France

Bugaled Breizh : La Bretagne dit adieu au navire

Voilà près de vingt ans que l’épave était entreposée sur la base navale de Brest. Six mois après son mystérieux naufrage au large du cap Lizard (Royaume-Uni), le chalutier Bugaled Breizh y avait été déposé pour y être ausculté. Depuis, il n’avait plus bougé. Le 15 avril 2004, le bateau de pêche immatriculé au Guilvinec avait sombré, emportant les cinq marins qui se trouvaient à bord. Un mystère qui n’aura jamais été élucidé, laissant les familles des victimes dans l’incompréhension. Pendant dix-neuf ans, elles se seront battues pour tenter d’obtenir la vérité, avec la certitude qu’un ou plusieurs sous-marins étaient impliqués dans le mystérieux naufrage. Dix-neuf ans après, la carcasse du Bugaled Breizh (les enfants de Bretagne en français) vient d’être grignotée. Pendant cinq jours, le bateau sera déconstruit par l’entreprise Navaleo, chargée du chantier. Comme un dernier adieu.

Le démantèlement a démarré lundi sur la base navale de Brest. « C’est un chantier chargé d’émotion et on y apporte une attention très particulière », a déclaré mardi Pierre Rolland, président de Navaleo. « Les morceaux d’acier seront transportés sur notre site sur le port de Brest pour être recyclés dans une fonderie française. »

Placée sous scellés par la justice, l’épave avait été renflouée en juin 2004 après des manifestations des familles des marins disparus. Sur la coque, les traces pouvaient laisser penser à « une croche » par un sous-marin. Barrée par le secret-défense, l’enquête démontrera cependant que le bateau avait coulé en trente-sept secondes. Mais jamais la justice n’aura pu attester que le naufrage était dû à un tiers. En France, les procédures engagées se sont toutes soldées par un non-lieu. Quant à la procédure britannique, dernier espoir des familles, elle avait conclu à un simple accident de pêche. Une décision qui n’a convaincu personne mais a mis un terme aux espoirs d’obtenir la vérité.

Des pièces seront remises à l’armateur

Avec la fin des enquêtes judiciaires française et britannique, le procureur général de Rennes avait décidé de procéder au démantèlement du bateau. Lors d’une cérémonie privée organisée devant l’épave le 8 avril avec les familles des victimes, quelques objets avaient été restitués. Un canif et un percolateur à café avaient notamment été remis. « C’est bête un percolateur à café, en plus dans un état médiocre… Mais c’est quand même l’endroit où tout l’équipage se retrouve plusieurs fois par jour, c’est un élément de vie. Il faut bien comprendre qu’en 2004, au moment de l’événement, la vie s’est arrêtée d’un coup en quelques secondes », explique Christophe Monnier, expert judiciaire à la cour d’appel de Rennes.

Une douzaine de pièces du bateau, dont la casquette avec le nom « Bugaled Breizh », seront remises à l’armateur et à l’association SOS Bugaled à l’issue du démantèlement.