France

Auvergne-Rhône-Alpes : Qu’est-ce que le méningocoque B, ce microbe rare qui touche surtout les jeunes ?

La situation n’a « rien à voir » avec celle de Strasbourg, assure Alexandra Thabuis, épidémiologiste à Santé publique France lors d’un point presse à Lyon. Depuis un an et demi, dix-sept cas d’un variant précis de méningocoque B ont été détectés dans une zone précise d’Auvergne-Rhône-Alpes. Toutes les personnes contaminées, âgées entre 16 et 21 ans, sont restées plusieurs jours en réanimation. Et un de ces jeunes est décédé. Une situation qui pousse l’Agence régionale de santé (ARS) à lancer une campagne intense de vaccination. Mais en fait, c’est quoi le méningocoque B ? Pourquoi il touche surtout les jeunes adultes ? Et pourquoi circule-t-il intensément dans la région ? 20 Minutes fait le point.

Qu’est-ce que le méningocoque B ?

Il existe plusieurs groupes de méningocoque : les C, B, Y et W. C’est une bactérie qui se trouve au fond de la gorge, dans la salive. L’infection la plus fréquente, lorsqu’on attrape ce microbe, s’appelle la méningite. C’est une maladie « rare », habituellement entre deux cas par an dans la région, mais qui peut être « gravissime » avec « un passage en réanimation presque systématique », alerte Alexandra Thabuis. Si elle n’est pas prise à temps, elle peut être mortelle (10 % des cas entraînent un décès) ou laisser des séquelles importantes comme des amputations de membres.

Pourquoi cette souche de la bactérie circule spécifiquement dans dix communes d’Auvergne-Rhône-Alpes ?

Plusieurs cas de méningocoque B ont été identifiés dans différentes zones en France. Mais la situation en Auvergne-Rhône-Alpes est « particulièrement inquiétante » et « différente » de ce qui se passe ailleurs. Alexandra Thabuis développe : « C’est un nouveau variant du groupe B, encore jamais observé en France, qui a émergé dans la région en 2021. A lui seul, il a contaminé dix-sept personnes (parmi soixante cas recensés toutes souches confondues), âgées entre 16 et 21 ans, en un an et demi, dont une qui est décédée. »

Le comité de surveillance de Santé publique France a alors analysé des « regroupements de foyers » et a conclu à un phénomène d’hyperendémie, c’est-à-dire, une augmentation durable et intense d’incidence. « Deux secteurs avaient été identifiés, à Chambéry et dans l’Est lyonnais, poursuit la spécialiste. La première zone n’est désormais plus hyperendémique, sans nouveau cas depuis un an. Mais la souche continue de circuler dans l’autre périmètre. On a alors identifié dix communes, neuf en Isère et une dans le Rhône, où le risque d’attraper la maladie est deux cent fois plus élevé chez les 15-24 ans que dans le reste de la région. »

Alexandra Thabuis souligne qu’il n’y a « pas d’explication sur la zone ». Les variants du méningocoque B peuvent « disparaître comme ils apparaissent », explique-t-elle. Ce qui est sûr, ce sont les « conditions idéales » dont la bactérie a profité pour émerger. Parmi elles, la pandémie de Covid-19 qui a fait baisser l’exposition au microbe pendant deux ans et a entraîné avec elle une chute de l’immunité. Mais aussi, d’autres infections respiratoires, comme la grippe très présente cet hiver, qui ont pu favoriser l’infection invasive à méningocoque B.

Pourquoi cette infection invasive à méningocoque (IIM) B touche surtout les jeunes ?

« Le germe du méningocoque B se transmet par les gouttelettes, par la toux ou des postillons, lors d’un contact rapproché et prolongé », indique Bruno Morel, directeur délégué veille et alertes sanitaires de l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes.

Et les nombreuses interactions sociales entre 16 et 24 ans expliqueraient cette circulation intense de la bactérie dans cette tranche d’âge. « Les cas identifiés avaient fréquenté des lieux festifs, ce qui peut favoriser les échanges du microbe », précise Alexandra Thabuis. « Nous aussi, on aimerait bien savoir mais on n’a pas encore toutes les réponses », avoue Bruno Morel.

La spécialiste de l’épidémiologie conclut : « La seule façon de se protéger est de faire le vaccin. Les deux derniers malades n’étaient pas vaccinés et auraient pu éviter les dix jours passés en réanimation. » Ce dernier est recommandé pour tous les jeunes entre 16 et 24 ans, il n’a pas d’action sur le portage et la transmission mais « simplement sur la protection individuelle » pour éviter des formes graves.

Depuis janvier 2018, il est aussi fortement conseillé pour les enfants de moins de 4 ans, « parce qu’ils sont très fragiles à ces âges », souligne la représentante de Santé publique France.