Belgique

La professeure Caroline Nieberding n’a pas été victime de harcèlement moral ni de violence au travail de la part de l’UCLouvain

Juste avant le confinement

Le feu couve depuis que Caroline Nieberding a rejoint l’UCLouvain, en 2008. La chercheuse a intégré un institut de sciences composé uniquement d’hommes. Selon son récit, elle a très vite subi des gestes déplacés de certains collègues, des remarques sexistes et d’autres types de discrimination. Des comportements qu’elle a fini par dénoncer auprès du vice-recteur à la politique du personnel (VRPP) en janvier 2020. C’était à la veille du confinement pour cause de Covid.

L’UCLouvain a mandaté la cellule d’accompagnement du service formation, accompagnement et bien être (Fabi) d’investiguer et de proposer des pistes de résolution du conflit. Le rapport établi par le service Fabi n’a pas constaté de sexisme mais bien des conflits entre personnes.

Aucun fait objectivé

Deuxième initiative de l’UCLouvain : une commission d’enquête interne, mise sur pied en septembre 2020. Cette commission a fait “un travail rigoureux et de grande ampleur”, juge la cour du travail. “Il ne s’agissait nullement d’un encommissionnement destiné à enterrer l’affaire.”

Si elle n’a pas donné lieu à la mise en place de mesures spécifiques en rapport au sexisme ou au harcèlement sexuel, c’est parce qu’aucun fait de cet ordre n’a pu être objectivé, indique l’arrêt. Même si la cour du travail en convient : ce sont des faits difficiles à prouver.

En revanche, ce qui a été mis en évidence, c’est l’existence de dysfonctionnements organisationnels, avec des responsabilités partagées et de la virulence de part et d’autre.

Cette situation d’hyperconflit entre académiques s’est doublée de difficultés relationnelles entre la professeure Nieberding et un technicien qui, l’un après l’autre, ont introduit une demande d’intervention psychosociale. Dans l’attente d’une solution pérenne, en avril 2021, la jeune femme a été retirée du pôle où elle était en contact avec les collègues dont elle a dénoncé les comportements.

Une procédure disciplinaire

Le climat s’est encore envenimé par la suite. En mai 2022, le VRPP adressait un avertissement écrit à la professeure Nieberding pour avoir refusé de signer un document destiné à la défense de thèse d’un doctorant. Le 5 juillet 2022, l’enseignante est informée de l’existence de griefs disciplinaires à son égard, qui doivent être examinés le 25 août par la commission d’instruction disciplinaire de l’UCLouvain. Dans l’intervalle, elle dépose plainte, le 5 août 2022, devant le tribunal du travail pour demander sa réintégration dans le pôle Eli, la suspension de la procédure disciplinaire et la condamnation de l’UCLouvain pour harcèlement moral et violence au travail.

Le recteur de l’UCLouvain lance le programme « Respect »

L’UCLouvain a pris les griefs au sérieux

Dans une ordonnance du 7 octobre 2022, le tribunal du travail du Brabant wallon donnait droit à la professeure Nieberding, estimant qu’elle devait retrouver pleinement sa place au sein de l’institut et que la procédure disciplinaire à son encontre n’avait pas lieu d’être.

L’UCLouvain a fait appel de cette ordonnance. La cour du travail de Bruxelles vient de lui donner largement raison, réformant l’ordonnance de première instance. Contrairement à ce que réclamait l’avocate de Caroline Nieberding réclamait, on ne peut pas dire que l’institution universitaire s’est rendue coupable de harcèlement moral ou de violence au travail à son égard, dit l’arrêt. L’UCLouvain a pris au sérieux les griefs qu’elle a exprimés en janvier 2020, “y compris dans leur dimension de dénonciation d’une situation de sexisme et de harcèlement sexuel”. La jeune femme a été reçue par le VRPP et la conseillère du recteur à la politique du genre. L’université a pris de nombreuses mesures pour enquêter sur les faits dénoncés et tenter de pacifier les relations explosives entre la professeure et ses collègues.

Il est vrai que les mesures mises en place par l’UCLouvain n’ont pas mis l’accent, comme le souhaitait Caroline Nieberding, sur la lutte contre le sexiste et le harcèlement sexuel, sinon en lançant, deux ans après ses premières plaintes, le programme « Respect », dit aussi la cour du travail.

Ce retard est est “regrettable”, selon l’arrêt : même si aucun fait n’a pu être objectivé, le ressenti de la professeure Nieberding ne peut pas être ignoré, “d’autant plus qu’un climat de sexisme est une situation des plus difficiles à prouver”.