Belgique

Concert de Beyoncé à Bruxelles : des conseillers communaux recevront leurs tickets « pour exercer leur contrôle démocratique »

Les places s’arrachent. La moins chère est vendue à 171 euros mais certaines atteignent les 817 euros.

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Une autre possibilité existe pour assister au show.

En tant que propriétaire du stade, la Ville de Bruxelles reçoit, pour chaque événement qui y est organisé, un quota de tickets, qu’elle distribue ensuite selon son bon vouloir, par l’intermédiaire de son échevin des Sports. Cette contrepartie a été historiquement négociée par la Ville, via la convention de location du stade.

Cela concerne les rencontres des Diables rouges, la finale de la Coupe de Belgique de football, mais aussi les concerts. Un même mécanisme est d’application au Palais 12 ou au Cirque Royal.

”C’est une coutume”

”C’est une coutume qui n’est pas remise en question jusqu’ici”, nous confirme le porte-parole de Benoît Hellings (Écolo), échevin bruxellois des Sports. “Offrir des tickets, c’est aussi outil de relation publique. Cela nous permet par exemple de remercier les personnes de l’administration communale qui ont réalisé les travaux et ont permis l’organisation du concert, en installant par exemple les sièges. Nous en offrons aussi au conseil de quartier, car ce sont des gens qui s’impliquent pour la Ville, sans rétribution financière. Il y en aura aussi pour l’Union belge, qui nous a facilité le travail. C’est un échange de bons procédés.”

La pratique ne doit pas être diabolisée a priori. Elle permet notamment de distribuer des tickets aux jeunes sportifs de la région, qui ont bien performé.

Les autorités politiques ont toutefois également droit à une part du gâteau, qui permet de “faire plaisir” aux personnes de leur choix. Le bourgmestre, les échevins et l’ensemble des 49 conseillers communaux vont ainsi recevoir, comme c’est le cas pour les autres concerts ou matches de football, des tickets pour assister au concert de Beyoncé.

Combien ? Le cabinet de l’échevin Benoît Hellings se refuse à communiquer le chiffre. “Nous jugeons que c’est une information qui n’a pas besoin d’être divulguée.”

Selon les informations de La Libre, le nombre de places dont hérite la Ville tourne autour de 400, dont une soixantaine de places d’honneur pour les autorités politiques de la Ville.

Le bourgmestre se voit ainsi octroyer quelque 25 places, tandis que six tickets sont dévolus à chaque échevin, ainsi que deux par conseiller communal.

L’octroi de ces tickets aux conseillers, dont ceux issus de l’opposition, est destiné, selon la justification qui leur est envoyée, à leur permettre “d’exercer (leur) rôle de contrôle démocratique en vivant de l’intérieur l’expérience du Stade aux 50 000 sièges flambant neufs, lors de cet évènement de très grande envergure”.

L’argument paraît bien commode…

Pour certains élus, le contrôle démocratique semble ainsi devoir nécessairement s’effectuer depuis les places d’honneur.

Un conseiller communal de l’opposition a ainsi réclamé par mail que ses deux places pour le concert de Beyoncé, attribuée “par erreur” en tribune classique, soient converties en places destinées à la tribune d’honneur, afin de lui permettre d’assister à l’évènement en compagnie d’un diplomate.

L’engouement suscité par la venue de la chanteuse américaine dépasse la sphère politique.

Car ce concert unique revêt un caractère exclusif que n’avaient par exemple pas les quatre concerts de rang organisés par Coldplay l’an dernier.

La colère gronde dans de nombreux services qui n’ont cette fois pas reçu de tickets pour ce concert”, nous glisse une source bien informée.

”Cela permettait à certains d’arroser leurs proches”

”À une époque, on parlait de 800 tickets octroyés à la Ville, dont 14 par échevin, c’est beaucoup moins aujourd’hui. Une partie de l’octroi de ces tickets est en effet laissée à la discrétion des échevins. C’était une manne considérable, qui permettait à certains d’arroser les proches. Il y a sur ce point des excès et un manque de transparence. On le dénonçait déjà quand on était en majorité”, souligne Geoffroy Coomans de Brachène (MR), conseiller communal à la Ville de Bruxelles et ancien échevin.

La pratique n’a toutefois pas été stoppée par le MR, lorsqu’il appartenait à la majorité bruxelloise.

”Pour moi, c’était très simple : premier arrivé, premier servi. Quand j’étais en poste, j’avais un collaborateur qui ne faisait que s’occuper de l’octroi des tickets et se fâchait avec tout le monde”, se souvient Alain Courtois (MR), échevin bruxellois des Sports de 2012 à 2018. “Cela a toujours été un sujet extrêmement délicat. Il faut être très strict, sinon cela peut mener à des exagérations…”