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Sergueï Jirnov, ex-agent du KGB: “Poutine vit dans le passé, mais il est déjà fini”

Mais quand peut-on parler de survie? Une attaque sur Poutine ? Un drone sur le Kremlin ?

Rien de rassurant. L’ex-agent clandestin du KGB rappelle que la doctrine nucléaire russe, consolidée sous la présidence de Dmitri Medvedev en 2010, implique que des armes nucléaires peuvent être utilisées dans le cas où la survie de l’État est menacée. Mais quand peut-on parler de survie ? Une attaque sur Poutine ? Un drone sur le Kremlin ? Viastcheslav Volodine, président de la Douma, l’Assemblée nationale russe, n’a-t-il pas déclaré que “Poutine et Russie ne font qu’un” ? Question légitime, quoiqu’il faut rappeler que la base de la dissuasion, partagée par toutes les puissances nucléaires, est justement l’incertitude sur le moment précis où un critère s’applique.

Seul parmi les fidèles

Sergueï Jirnov estime aussi que la Russie compense la faiblesse de ses armes conventionnelles par un surarmement nucléaire et qu’il n’est donc pas impossible que la Russie, acculée, finisse par utiliser des armes nucléaires tactiques, même de puissance limitée, sur le champ de bataille. Il s’inquiète de la montée en puissance d’individus “aussi dangereux et imprévisibles” que sont Evguéni Prigojine, le patron de la milice Wagner, et Ramzan Kadyrov, le chef de la république président tchétchène. “Ils se serviraient de l’arme nucléaire, et sans attendre”, écrit-il.

Sergueï Jirnov, ex-agent du KGB: « Le moment que je crains le plus, c’est la victoire des Ukrainiens »

L’auteur note que les forces russes ont, dès le début de la guerre en Ukraine, pris brièvement le contrôle de l’ancienne centrale de Tchernobyl, “symbole puissant et terrifiant”, puis de la centrale toujours active de Zaporija, la plus grande d’Europe. Cette dernière est devenue “une arme” aux mains de Poutine. Il peut la faire arrêter à n’importe quel moment ou imputer aux forces ukrainiennes le moindre obus qui tombe à proximité.

Poutine a certes appelé les forces russes à se “tenir prêtes à réaliser des essais d’armes nucléaires”…mais au cas seulement où les États-Unis en prendraient l’initiative.

Poutine est-il fou ? Peut-il nous entraîner dans une escalade militaire ? Jirnov ne répond pas vraiment à la question, mais analyse le parcours d’un président qui s’est progressivement isolé, notamment durant la pandémie du Covid, voit son aura s’étioler et ne s’entoure que de fidèles. Il impute l’excès de confiance du président lors du Blitzkrieg sur Kiev au fait qu’il a été conseillé par le FSB, le service de renseignement intérieur et de contre-espionnage, et non par le GRU militaire et par le SVR chargé du renseignement extérieur.

Un discours presque rassurant

Au premier anniversaire de la guerre en Ukraine, Sergueï Jirnov s’attendait à un discours menaçant de Poutine devant le parlement russe. Au lieu de cela, on a eu droit à un “laïus brejnévien” d’une heure quarante-cinq minutes. Presque rassurant car Poutine a certes appelé les forces russes à se “tenir prêtes à réaliser des essais d’armes nucléaires”…mais au cas seulement où les États-Unis en prendraient l’initiative, ce qui n’est pas à l’ordre du jour.

La conclusion de l’auteur est que Poutine “vit dans le passé, mais est déjà fini. Il faut juste encore un peu de temps pour que les chefs d’État et les experts en tout genre le comprennent”.

L’Escalade, par Sergueï Jirnov, Albin Michel, mai 2023, 213 pp., 20,90 euros.