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Olivier Mateu, le dur des durs de la CGT

Une vision passéiste du syndicalisme ? « Accepter des fermetures de boîtes ou condamner des filières entières, c’est moderne ? », rétorque celui qui défend une retraite à 60 ans et le smic à 2.000 euros.

Adepte des punchlines, avec l’accent marseillais, il martèle: « Les assiettes sont vides », pour « les travailleurs pauvres, la pénurie c’est du 9 au 31 ». Et surtout ne lui parlez pas de réquisition, sinon « c’est la guerre ».

« Jusqu’au dernier cégétiste, vous devrez nous crever. Vous touchez un camarade dans une raffinerie, on vous met le feu au département, mais pas le feu ‘on s’énerve’, on vous met le feu, les flammes », assure-t-il ainsi avoir lancé au préfet des Bouches-du-Rhône cet automne, lors du blocage des raffineries pour des hausses de salaire.

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D’ailleurs, « le seul département où il n’y a pas eu de réquisition, c’est les Bouches-du-Rhône », poursuit-il dans cette intervention filmée, dont ses soutiens se délectent sur Twitter.

Quand le porte-parole du parti présidentiel, Loïc Signor, lui lance récemment sur BFM TV qu’il est « dangereux pour la démocratie », Olivier Mateu, en duplex, fume tranquillement une cigarette, faisant mine de ne pas l’écouter.

Au PC à 14 ans

Les débats policés et le politiquement correct, très peu pour lui. Olivier Mateu revendique sans problème l’adhésion de la CGT 13 à la Fédération syndicale mondiale (FSM), classée très à gauche, que la confédération a quittée en 1995.

De même, il assume ne pas soutenir le président ukrainien face à la Russie: « Qu’est-ce qui n’est pas clair quand je dis que nous ne soutenons ni Vladimir Poutine, ni Volodymyr Zelensky ? La guerre en cours est une guerre d’un impérialisme contre un autre », s’agace-t-il auprès de l’AFP.

Olivier Mateu est le reflet de son territoire. Encarté au parti communiste à 14 ans, il vient d’une famille de militants qui a combattu le franquisme en Espagne. Il a grandi à Port-de-Bouc, une des rares villes du département encore communiste, coincée entre Martigues et Fos-sur-Mer, au coeur d’un complexe industrialo-portuaire où les porte-conteneurs barrent l’horizon.

Pour lui, hors de question de condamner ces filières. Ainsi, il critique la participation de la CGT au collectif « Plus jamais ça », lancé en 2020, qui réclame notamment l’arrêt des soutiens publics aux projets dans le secteur des énergies fossiles. Et prône plutôt une « socialisation des moyens de production », tout en jurant qu’il n’est pas climatosceptique.

Au sein de l’union départementale CGT, une des plus puissantes de France avec près de 35.000 adhérents, les voix dissonantes se font rares. « Aujourd’hui, il faut une lutte dure et inflexible, parce qu’on a un gouvernement dur et inflexible. Olivier est franc, il ne mâche pas ses mots », estime Nadia Chakroune, cheminote de 44 ans.

Du côté de l’intersyndicale, on se contente de dire qu’Olivier Mateu est un « interlocuteur habituel ». Au patronat, en revanche, l’hostilité est affichée.

Il y a quelques jours, le président de l’UPE 13 (Union pour les entreprises), Philippe Korcia, est sorti essoré d’un échange musclé avec lui, lors d’une émission de La Provence: vous êtes « dans un truc totalitariste, impossible, (…) la fin du monde pour les entreprises », a-t-il fini par lâcher.

A 48 ans, Olivier Mateu assure même vouloir succéder à Philippe Martinez à la tête du syndicat. Quand bien même sa candidature serait a priori non conforme aux statuts. Et de balayer l’argument qui se dessine en interne pour une candidature féminine: « Une femme oui, mais il faut des contenus ».