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L’Italie déclare l’état d’urgence face aux arrivées de migrants : « Ce gouvernement veut déshumaniser ceux qui arrivent »

« C’est négatif et hors de propos de crier à l’urgence ou à l’invasion », critique Marwa Mahmoud, choisie au sein du parti démocrate, le principal parti d’opposition, pour s’occuper des questions migratoires, « nous ne pouvons pas définir les personnes avec un vocabulaire que nous utilisons pour les catastrophes. Ce ne sont pas des débarquements mais des sauvetages en mer. Ce sont des hommes et des femmes, et l’Italie est capable de les accueillir. Le gouvernement a un seul objectif: augmenter la tension et déshumaniser ceux qui arrivent et qui fuient une situation difficile ».

Les chiffres

En Sicile et à Lampedusa, les centres d’accueil (les « hotspots ») sont plein à craquer. Au total, cent quinze mille migrants se trouvent sur le territoire italien dans des structures d’accueil ou en attente de rapatriement. Pourtant, ces chiffres sont bien inférieurs à ceux que d’autres gouvernements ont affronté dans le passé sans jamais déclarer l’état d’urgence. Ainsi en 2016, le gouvernement de Matteo Renzi a géré l’accueil de cent quatre vingt mille migrants. En 2017, son successeur Paolo Gentiloni verra débarquer cent vingt mille personnes. Seul l’exécutif de Silvio Berlusconi en 2011 avait déclaré l’état d’urgence au moment du printemps arabe lorsque soixante deux mille personnes sont arrivées en Italie. « Giorgia Meloni décrète l’état d’urgence parce qu’elle est incapable de gérer les arrivées », attaque Giuseppe Conte, du Mouvement 5 Etoiles, estimant que c’est aussi un écran de fumée pour détourner l’attention sur un faux problème alors que le gouvernement éprouve des difficultés à tenir ses promesses notamment sur la gestion économique et financière du pays.

Migrants disembark from a ship in the Sicilian port of Catania, Wednesday, April 12, 2023. Italy's right-wing government has declared a state of emergency to help it cope with a surge in migrants arriving on the country's southern shores. Premier Giorgia Meloni and her Cabinet on Tuesday, decided to impose the emergency status for six months. (AP Photo/Salvatore Cavalli)
Des migrants débarquent d’un bateau dans le port sicilien de Catane, mercredi 12 avril 2023. Le gouvernement italien de droite a décrété l’état d’urgence pour faire face à l’afflux de migrants sur les côtes du pays. (AP Photo/Salvatore Cavalli) ©AP

De la propagande à la réalité

Ces arrivées de milliers de demandeurs d’asile mettent clairement en difficulté le gouvernement de Giorgia Meloni qui avait fait de la politique migratoire le noyau de sa bataille politique lorsqu’elle était à l’opposition. Elle qui parlait de bloquer les ports, de limiter les départs, est désormais face à la réalité du pouvoir. Rentrée bredouille du dernier sommet européen, malgré l’oreille bienveillante d’Ursula Von der Leyen, Giorgia Meloni doit aussi gérer le turbulent Matteo Salvini qui se dit satisfait de l’instauration de l’état d’urgence en attendant que « l’Europe se réveille ! ». Paradoxalement les agriculteurs et les entreprises italiennes demandent au gouvernement de relâcher les mailles de la migration légale pour avoir plus de main-d’oeuvre à disposition, au risque de ne pas pouvoir assurer la récolte dans leur champs cet été. Une équation bien compliquée pour une coalition souverainiste qui a gagné en promettant de limiter les étrangers sur le sol italien.

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