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La communauté juive américaine inquiète de la dérive du gouvernement Netanyahou

Des milliers d’Israéliens vent debout contre la réforme de la justice

Israël bénéficie historiquement aux États-Unis d’un soutien presque inconditionnel de la classe politique, à gauche comme à droite. Le parti républicain est cependant encore davantage attaché à la défense de l’État hébreu, du fait de son électorat chrétien évangélique, qui voit dans la survie de celui-ci le préalable au retour du Christ sur terre.

Une douzaine d’organisations de défense des intérêts d’Israël militent ainsi auprès du Congrès américain pour que celui-ci légifère d’une façon favorable à l’État hébreu. Certaines de ces associations défendent la création d’un État palestinien viable aussi rapidement que possible, mais elles sont minoritaires. Ce sont ces dernières qui se montrent les plus inquiètes des changements intervenus dans l’exécutif israélien.

À gauche, une hostilité certaine

Comme l’explique le rabbin Lerner, éditorialiste du périodique Tikkun, le magazine de référence de la communauté juive progressiste américaine, “les pratiques du gouvernement Netanyahou et l’influence croissante au sein du gouvernement de la droite religieuse rendent de plus en plus difficile, justement, d’imaginer à terme la création d’un État palestinien pérenne”. C’est là un positionnement que le magazine a toujours défendu. “Suite à l’installation du nouveau gouvernement en Israël, de nombreuses voix désirent d’ailleurs faire pression sur les membres du Congrès de manière telle que ceux-ci gèlent les paiements de toute aide militaire américaine tant qu’Israël continue d’utiliser ces moyens militaires en Cisjordanie”, poursuit l’éditorialiste, tout en déplorant que ce mouvement n’ait pas encore atteint sa “maturité” au sein des communautés israélites.

La population juive américaine demeure essentiellement démocrate, même si, comme le rappelle le rabbin Lerner, “elle brille par sa diversité ; il y existe presque autant d’opinions que d’individus”. “Toutefois, poursuit-il, une grande partie de la communauté qui vote à gauche se montre très critique des évolutions en cours en Israël, à tel point que d’aucuns souhaiteraient être sur place pour se joindre aux manifestants contre ce gouvernement quasi fasciste”.

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La nouvelle génération de gauche semble en effet encore beaucoup plus portée que celle de ses aînés vers des principes de justice sociale et de défense des intérêts des Palestiniens. Une opinion corroborée par le rabbin Lerner : “Même si, en public, un grand nombre de juifs démocrates préfèrent ne pas critiquer Israël de peur que ces critiques nuisent aux intérêts de l’État (fragile) d’Israël, en privé ils se montrent extrêmement inquiets de la tournure des événements”.

À droite, on observe plus placidement

Les organisations de défense des intérêts d’Israël auprès du Congrès américain courtisent à parts égales les démocrates et les républicains, évitant en général d’exprimer une préférence en termes d’affiliation politique. Mais même si ces organisations ont toujours brillé par un soutien sans faille au sionisme et à l’État d’Israël, certaines d’entre elles, réputées conservatrices, ont vu dans les événements récents un signal inquiétant. Ainsi l’Anti-Defamation League s’est-elle récemment déclarée inquiète du “racisme juif” au sein du gouvernement israélien.

Jack Rosen, président du Congrès Juif Américain, fondé en 1918, et réputé davantage à droite, préfère de son côté tempérer : “Les déroulements récents en Israël, s’ils demeurent à surveiller, démontrent avant tout la vivacité de la démocratie israélienne”. Et d’estimer que la presse internationale et européenne est “par trop alarmiste sur une possible dérive idéologique dans le pays”.

La présidence de Donald Trump a constitué une période “bénie” pour la droite israélienne en ce qui concerne les relations entre les États-Unis et Israël. Cette période a notamment été marquée par le déménagement de l’ambassade américaine à Jérusalem. Mais même après le départ de M. Trump – et en attendant peut-être son retour – le parti républicain demeure fermement attaché aux principes défendus par la droite israélienne, y compris religieuse.

Le speaker républicain de la Chambre des représentants Kevin McCarthy a ainsi annoncé cette semaine sa décision de procéder prochainement à une allocution devant le Parlement israélien. Il n’est que le deuxième speaker à entreprendre une telle initiative. Ce soutien républicain au gouvernement de M. Netanyahou marque d’ailleurs un contraste de plus en plus important avec l’attitude des équipes du président Biden vis-à-vis de ce dernier.