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Des militants écologistes condamnés pour avoir bloqué une autoroute

Après plus de cinq heures d’audience, cinq d’entre eux ont été condamnés à 35 heures de travail d’intérêt général (TIG) et les trois autres, qui n’acceptaient pas les TIG, à 90 jours-amende.

Le parquet avait requis de 50 à 70 heures de travail d’intérêt général contre ces militants écologistes, des hommes et des femmes au casier judiciaire vierge âgés de 21 à 42 ans.

Le soir du 28 octobre 2022, vendredi de départ en vacances, ils avaient bloqué pendant une demi-heure l’A6 en direction de la province en s’asseyant sur les voies au niveau d’Arcueil (Val-de-Marne), pour attirer l’attention sur la rénovation thermique des bâtiments.

Un geste de « désobéissance civile », selon eux, qui leur a valu un renvoi devant le tribunal pour « entrave à la circulation » et « mise en danger de la vie d’autrui ».

Si la première qualification a été reconnue et assumée, la seconde a fait grincer le banc des prévenus.

« Ce que j’ai fait, c’est au contraire pour défendre la vie d’autrui », a expliqué l’un d’eux, Lucas T. « Je trouve ironique qu’on me reproche d’avoir mis en danger la vie d’autrui alors que j’ai fait ça pour le bien commun », a abondé une autre, Laure M.

Les militants ont tous été condamnés pour l’entrave à la circulation. En revanche, ils ont été relaxés pour la mise en danger de la vie d’autrui.

Face à la présidente du tribunal qui les interrogeait sur les dangers de la route, les prévenus, pour la plupart étudiants, animateurs ou en recherche d’emploi, ont répondu en mettant en avant le réchauffement climatique ou la mortalité liée à la pollution.

Les actions comme le blocage d’autoroute, bien qu’illégales, sont le seul moyen de se faire entendre, ont plaidé les militants.

« J’ai fait plein d’actions justes et légales et ça n’a pas marché », a développé à la barre Rachel S. Ce blocage, « qui a été très médiatisé, a permis avec d’autres actions de mettre la question de la rénovation thermique sur le devant de la scène », a-t-elle ajouté.

« Un levier »

Les prévenus ont pu compter sur le soutien avant l’audience d’élus de la Nupes comme les députées Clémence Guetté et Sandrine Rousseau.

Deux personnalités de renom, le rapporteur spécial de l’ONU sur les défenseurs de l’environnement, Michel Forst, et Agnès Ducharne, climatologue et chercheuse au CNRS, ont également témoigné en leur faveur pendant le procès.

« La désobéissance civile est un levier qui peut faire évoluer les mentalités et le droit », a expliqué le premier, « les défenseurs du climat ne doivent pas être traités comme des +écoterroristes+, comme on peut parfois l’entendre ».

« Ce contexte de catastrophe climatique annoncée justifie la désobéissance civile non-violente », a pour sa part déclaré Agnès Ducharne, regrettant que le blocage d’autoroute « touche plus l’opinion qu’un rapport du GIEC ».

Des arguments qui n’ont pas convaincu le parquet.

« Je ne conteste pas la réalité du changement climatique », mais « on peut se faire entendre en respectant la légalité », a dit la procureure lors de ses réquisitions.

La représentante du ministère public a estimé qu’il y avait une « absence de lien de cause à effet » entre le blocage de cette autoroute « et la sauvegarde de la vie humaine » et rejeté l’argument de « l’état de nécessité », selon lequel une action illégale peut être autorisée face à un danger imminent, brandi par les avocats de la défense.

Pendant l’audience, certains des prévenus ont admis à la barre qu’ils arrêteraient la désobéissance civile, trop « éprouvante ».

Mais d’autres ont indiqué ne pas compter s’arrêter. « L’enjeu climatique est beaucoup trop important », a prévenu une militante.