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Des frais de députés qui posent question au Parlement européen

Dans les formations de gauche, comme les Verts/ALE ou GUE/NGL, l’idée de faire la transparence sur les frais des députés s’invite à nouveau dans les débats. Chaque mois, les députés européens touchent une indemnité de frais généraux dont le montant s’élève à 4778 euros. Cette indemnité, qui leur est accordée pour couvrir leurs frais de bureau, ne doit pas être justifiée. C’est “l’une des rares dépenses pour lesquelles le député n’est pas tenu de rendre des comptes”, peut-on lire sur le site des Verts.

Pour l’année 2023, le montant total des frais forfaitaires devrait atteindre les 57 336 euros par eurodéputé. Même si tous les députés n’utiliseront pas cette somme, cela peut représenter plusieurs dizaines de millions d’euros. Un montant que le Parlement européen débourse chaque année sans réclamer de preuves de dépenses, telles des factures d’achat d’un ordinateur, d’une table de bureau ou encore d’une agrafeuse.

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L’argument avancé par ceux qui estiment qu’il ne faut pas toucher à ce système porte sur le coût. Mettre en place un organe chargé de vérifier les factures de frais de chaque député serait trop coûteux et trop lourd sur le plan administratif. Pour ceux qui demandent plus de transparence, c’est le coût à payer pour défendre la démocratie. Car, avancent-ils, cette enveloppe dépasserait souvent de loin les frais réellement engagés.

Sur les 56 394 euros de l’année 2022, Saskia Bricmont, députée Ecolo au Parlement européen, affirme n’avoir dépensé que 24 192 euros. Cet argent a été utilisé pour organiser des réunions qui nécessitent de louer une salle hors du Parlement pour des repas ou cafés de travail avec des journalistes, des ONG, des universitaires et des représentants d’intérêts divers. Ces dépenses concernent également les frais de téléphone et d’internet, l’usage de logiciels, certains déplacements et les frais de communication, comme des services de publication en ligne, l’abonnement à un service de newsletter ou l’achat d’images de banques de données, mais également l’achat de cadeaux protocolaires.

”J’ai utilisé un peu moins de la moitié de l’argent qui m’a été alloué”, détaille l’écologiste. “Ce qui restera sur mon compte sera reversé au Parlement européen à la fin de mon mandat.”

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À l’instar des Verts/ALE, la Gauche plaide également pour que les députés conservent tous leurs notes de frais et les déposent chez un organisme de contrôle. “Sans ça, ces frais peuvent être considérés comme des sursalaires”, commente Marc Botenga (PTB). Le député défend même une abolition plus radicale de certains privilèges, rappelant que les députés européens touchent de généreux avantages.

La rémunération mensuelle des députés s’élève à 9 808,67 euros avant impôts. Elle est imputée sur le budget du Parlement et s’établit à 7 647,13 euros après impôts. Il faut ajouter une indemnité annuelle qui rembourse leur frais de voyage et peut monter jusqu’à 4716 euros. Viennent ensuite les jetons de présences pour couvrir les frais de déplacements qui sont de 338 euros par jour. Enfin, le coût des voyages est remboursé sur présentation des titres de transport. On est donc grosso modo sur un “salaire” de 15 000 euros par mois.

Ces montants impressionnants sont justifiés par leurs défenseurs comme nécessaires pour couvrir l’ensemble des déplacements des eurodéputés qui viennent de différents pays pour assister aux réunions à Strasbourg et à Bruxelles. Mais sans justificatifs, sans preuves de dépenses, ces 40 millions d’euros annuels sont perçus par ses détracteurs comme étant simplement de l’argent de poche.

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”Cette discussion revient souvent en commission, notamment lors des contrôles budgétaires ou lorsque l’on vote les décharges budgétaires”, résume Olivier Chastel (Renew Europe). “Ça a déjà fait l’objet de nombreux amendements”, poursuit le député libéral qui confie avoir une farde dans laquelle il garde toutes ses factures.

À ce jour, il n’y a pas de consensus au Parlement européen pour faire la transparence sur l’usage de ces 40 millions d’euros.