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Algérie : Le journaliste Ihsane El Kadi voit sa peine alourdie en appel à sept ans de prison – Actualités Tunisie Focus

En première instance, le journaliste, poursuivi pour « financement étranger de son entreprise », avait été condamné le 2 avril à cinq ans de prison, dont deux avec sursis.

La cour d’appel d’Alger a alourdi dimanche 18 juin une peine infligée au patron de presse Ihsane El Kadi, en le condamnant à sept ans de prison, dont cinq ans ferme, a annoncé le représentant pour l’Afrique du Nord de Reporters sans frontières (RSF), Khaled Drareni.

Selon ses avocats, Ihsane El Kadi avait bon espoir de voir sa peine réduite. À l’opposé de ce signe d’apaisement attendu, la sanction a donc été plus grande : sept ans de prison dont deux avec sursis.

En première instance, M. El Kadi, poursuivi pour « financement étranger de son entreprise », avait écopé le 2 avril dernier de cinq ans de prison dont trois ans ferme.

Ce nouveau verdict est « choquant et incompréhensible », a écrit ce dimanche sur Twitter le représentant de RSF, Khaled Drareni, en annonçant cette nouvelle décision judiciaire.

Avec de nombreux intellectuels du monde entier, Reporter sans frontières a toujours soutenu et appuyé juridiquement Ihsane El Kadi.

« On ne peut pas bâtir un État moderne et démocratique sans liberté de la presse, défend M. Drareni sur RFI. Aujourd’hui, il y a Ihsane El Kadi, ça peut être un autre journaliste ; hier, c’était moi et bien d’autres confrères. Je pense que nous devons continuer à défendre Ihsane, nous devons continuer à défendre la presse libre et indépendante en Algérie. »

Lors du procès en appel tenu le 4 juin, le procureur général n’avait requis que la confirmation de la condamnation en première instance du patron de presse. Le parquet avait même reconnu que les charges pour financement étranger d’une entreprise étaient faibles.

M. El Kadi, 63 ans, dirigeant d’un des derniers groupes de presse privés et indépendants d’Algérie, Interface Média – qui comprend Radio M et le site d’information Maghreb Emergent – est emprisonné depuis le 29 décembre.

Il est connu pour ses prises de position critiques à l’égard du pouvoir en place. Son arrestation a suscité une vague de solidarité parmi ses collègues et les militants des droits humains en Algérie et en Europe.

M. El Kadi est accusé « d’avoir reçu des sommes d’argent et des privilèges de la part de personnes et d’organisations dans le pays et à l’étranger afin de se livrer à des activités susceptibles de porter atteinte à la sûreté de l’État et sa stabilité », avait indiqué la cour d’Alger.

La justice avait également prononcé la dissolution de sa société Interface Médias et la confiscation de tous ses biens saisis, outre des amendes contre lui et ses entreprises.

Dans une résolution adoptée le 11 mai, le Parlement européen a demandé la « libération immédiate et inconditionnelle » du patron de presse et a appelé les autorités algériennes à respecter la liberté des médias.

Le Parlement algérien avait réagi à cette prise de position, la qualifiant d’ « ingérence flagrante dans les affaires d’un pays souverain ». Il avait exprimé son « rejet catégorique » du texte « rempli de terribles contre-vérités » voté par les eurodéputés.

L’Algérie figure à la 136e place sur 180 pays au classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2023.

La sentence est très lourde. Le maximum de la peine était sept ans. Dans le dossier, il n’y a pas vraiment d’éléments constitutifs de cette infraction (…) C’est une décision qui ne repose pas sur des éléments de droit. Faire un pourvoi en cassation devant la Cour Suprême est le seul recours qui nous reste pour le moment.

Utilisant donc cet ultime recours juridique possible, Ihsane El Kadi a décidé de se pourvoir en cassation auprès de la Cour suprême.