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Bronny James, un prince qui a encore tout à prouver pour aller en NBA

De notre correspondant aux Etats-Unis,

Il a grandi sous le microscope des analystes, portant le fardeau des attentes démesurées de son pedigree. A 18 ans, LeBron James Jr sait qu’il n’atteindra sans doute jamais le niveau d’extraterrestre de son père, devenu cette année le meilleur marqueur de l’histoire de la NBA. Au match McDonald’s All-American, où s’affrontent les 24 meilleurs lycéens, « Bronny » a quand même montré, après une saison décevante en Californie, qu’il n’avait pas volé sa place, avec 15 points inscrits derrière l’arc mardi soir, et un état d’esprit exemplaire.

Mais alors que le « roi » James a, à 38 ans, l’objectif de jouer en NBA avec son fils sous le même maillot avant sa retraite, une course contre-la-montre est engagée. Le prince, qui sera éligible à la draft 2024 et doit dans l’immédiat choisir entre la filière universitaire ou professionnelle, va devoir mûrir très vite.

« Un shooter accompli avec un super tempérament »

LeBron James a transmis son nom à son fils, mais pas son physique hors-norme. Bronny plafonne à 1m90, loin des 2m06 de son père. Il s’est déjà fait dépasser par son frère, Bryce – annoncé à 1m95 à presque 16 ans – avec qui il jouait au lycée Sierra Canyon, dans la banlieue de Los Angeles. Considéré par les recruteurs comme un « combo guard », un meneur capable de jouer arrière, Bronny James possède une explosivité qui lui permet de faire mal en pénétration ou de claquer des dunks spectaculaires. Il a d’ailleurs terminé 2e du concours lundi soir, notamment en sautant par-dessus son cadet.

« C’est un athlète de haut niveau, un shooter accompli avec une bonne vision du jeu et qui défend très bien », analyse Tarek Fattal, journaliste au Los Angeles Daily News, qui couvre le basket lycéen et universitaire, et a suivi les performances de Bronny pendant quatre ans. « Il se donne à fond. Il a un super tempérament. Je ne l’ai jamais vu bouder une fois. » Selon Fattal, ce sont ces « intangibles », ces qualités difficiles à mesurer, qui sont particulièrement valorisées par les coachs à la fac, qui veulent des joueurs capables de s’intégrer dans un collectif.

Sur le parquet de Houston, Bronny n’a d’ailleurs jamais hésité à faire la passe supplémentaire et s’est rendu disponible pour aligner cinq paniers à trois points sur huit tentés. Alors qu’il n’arrivait pas vraiment à ce All-Star avec un statut de titulaire, il était bien sur le parquet dans le money time, un gage de la confiance des coaches. Il n’a pas pris le dernier shoot, mais c’est lui qui a décalé Jared McCain, mieux placé. La tentative lointaine du futur joueur de Duke a terminé sur l’arceau, scellant la défaite de l’ouest 106-109.

Une saison difficile en Californie

Quand LeBron James a signé avec les Lakers, il a choisi d’envoyer ses fils à Sierra Canyon, un lycée privé prisé des stars par lequel sont passées les sœurs Kylie et Kendall Jenner et Willow Smith. Et dont le programme de basket est monté en paissance ces dernières années, avec trois titres consécutifs de champions de Californie en 2018, 2019 et 2020. Pour ses débuts, Bronny James a joué avec Brandon Boston, Ziaire Williams et Christian Koloko, qui sont déjà en NBA, et Amari Bailey, qui devrait les rejoindre cette année.

Une rampe de lancement idéale, donc, mais la mise en orbite a capoté. Lors de ses deux années comme patron de l’équipe, Bronny a souvent joué sous les yeux d’un LeBron omniprésent en tribune, mais il n’a remporté aucun titre, pas même régional, avec des stats loin d’être exceptionnelles : moins de 14 points et 3 passes de moyenne cette année. Quand 20 Minutes est allé le voir jouer pour le dernier match de la saison régulière, fin février, il n’a pas démérité, avec 19 points. Mais les Trailblazers se sont effondrés 61-88 face à Notre Dame avant d’enchaîner par trois défaites lors des playoffs régionales, une contre-performance qui a relégué Sierra Canyon en 2nde division du tournoi californien à Sacramento. 

Pas de quoi décourager LeBron James, qui assurait le 6 mars sur Twitter que Bronny « est définitivement meilleur que certains (joueurs NBA) que j’ai vus jouer aujourd’hui ». Le lendemain, son fils sombre dans la petite finale, une nouvelle fois contre Notre Dame, avec seulement 10 points, pendant que Caleb Foster, revanchard après sa non-sélection au McDonald’s game, en enfile 28 et termine meilleur scoreur.

7 millions de dollars par an de sponsoring

Comment justifier la sélection All-Star de Bronny, qui a perdu quatre fois face à Caleb Foster cette année et s’est fait marcher dessus par le meneur de poche Jackson Shelstad dans un tournoi d’exhibition dans l’Oregon? Les accusations de népotisme ont fusé, face à des critères de sélection opaques. Avec la désagréable impression que si son nom de famille est lourd à porter, il lui ouvre des opportunités pas forcément méritées, sportives mais aussi financières, avec un père milliardaire et 13 millions de followers entre Instagram et TikTok.

Bronny James n’a pas encore choisi de fac pour la rentrée, mais il est déjà l’athlète universitaire le plus fortuné. Grâce à l’assouplissement des règles de l’association universitaire (NCAA), qui permet désormais aux sportifs de monétiser leur image, le basketteur-influenceur  a signé à l’automne dernier des contrats de sponsoring avec Nike et Beats, et possède sa ligne de caleçons chez PSD Underwear. Un pactole estimé à 7 millions de dollars par an par le site spécialisé On3. Soit le double de Caleb Williams, star du foot américain à USC, vainqueur du trophée Heisman, et dix fois plus que DJ Wagner et Isaiah Collier, désignés MVP mardi soir.

Le rêve « égoïste » de LeBron James

Bronny, que les analystes d’ESPN et de 247Sports placent autour de la 30e position dans leur top 100 des prospects lycée tandis que On3 fait bande à part en le plaçant 9e, a-t-il le potentiel pour s’imposer en NBA ? « Il a besoin de deux ou trois ans à la fac. Il a le talent pour contribuer à un programme NCAA majeur, plusieurs coachs de division 1 l’ont répété », assure Tarek Fattal. Ohio State, à deux heures d’Akron, où a grandi LeBron James, semble tenir la corde, même si USC, à Los Angeles, permettrait au paternel de garder un œil sur son développement. A moins qu’il ne choisisse directement la voie professionnelle, en patientant un an en G League – l’antichambre de la NBA – ou en allant jouer en Australie comme LaMelo Ball.

Ce qui est certain, c’est que l’objectif de participer à la draft de 2024 est ambitieux. On ne sait même pas si Bronny partage le rêve de devenir le premier duo père-fils à jouer en NBA. « Avec son désir égoïste, LeBron ne rend pas service à son fils » avec ce calendrier accéléré, accuse Fattal. Qui rappelle qu’en quatre ans, Bronny James n’a jamais été autorisé à répondre aux questions des médias après match. Sans aller jusqu’à tuer le père, le prince devrait peut-être commencer par couper le cordon avec le roi.