Belgique

« Trop cher », « pas besoin »: pourquoi les jeunes ne sont plus si pressés de passer leur permis de conduire

Un âge plus tardif

Auparavant, nombreux étaient les jeunes qui passaient le permis dès le jour de leur 18ème anniversaire. Mais cela a bien changé. Juliette, une étudiante de 22 ans, fait partie de ceux qui ne veulent pas passer le permis dans l’immédiat. « J’habite à Bruxelles depuis 15 ans, donc je fais tout en transports en commun. Parfois, ce serait pratique d’avoir le permis, mais j’arrive toujours à me débrouiller sans. Je suis déjà partie dans le sud de la France en stop, j’utilise des applis de covoiturage comme BlaBlaCar. Je suis assez débrouillarde. » Em, 20 ans, vit dans le centre de Namur et est dans le même état d’esprit. « Quand je dois me rendre quelque part, mon premier réflexe est de regarder comment y aller en transports en commun. En plus, d’un point de vue écologique, je n’aime pas trop l’idée d’utiliser une voiture seule. Je n’ai donc pas besoin du permis pour l’instant. »

« Les jeunes qui habitent dans les grandes villes ont moins besoin de la voiture étant donné que l’offre de transports en commun est plus importante », confirme Benoit Godart, porte-parole de Vias, l’institut de sécurité routière. « Ils passent donc généralement leur permis plus tard, quand ils en ont vraiment besoin. »

De bonnes raisons

Plusieurs jeunes que nous avons interrogés ont en effet fini par passer le permis vers 25 ans, par gain de temps, par facilité ou à cause du travail. « Pendant tout un temps, les transports en commun m’ont amplement suffi », explique Amandine, 22 ans. « J’étais également fière de me dire que je pouvais me déplacer en polluant moins. » Toutefois, elle a fini par passer son permis lorsqu’elle a décroché un stage à Braine-le-Comte. « En transport, je mettais 2h30 à l’aller, et 2h au retour. Cela m’a beaucoup fatiguée. Je me suis aussi rendu compte que j’étais limitée par les transports et que je devais systématiquement prévoir mes activités en fonction de leurs horaires. Je suis donc en train de passer le permis. »

Margaux a elle aussi fini par le passer « au cas où » et elle ne regrette pas. « J’ai déjà dû conduire pour rentrer de soirée, parce que mes amis avaient trop bu », explique-t-elle. « Quand je n’avais pas le permis, j’étais toujours celle qu’on conduisait partout et j’en avais marre. » Guillaume a quant à lui passé son permis lorsqu’il a déménagé dans un endroit plus reculé. « Il n’y a pas d’offre de transports près de chez moi. Si je n’avais pas eu le permis, je n’aurais vraiment pas pu me déplacer. »

Un rapport différent à la voiture

Ce n’est toutefois pas parce que les jeunes passent finalement le permis qu’ils se mettent à utiliser la voiture à tout-va. Matthieu, par exemple, a passé le permis tout en continuant à être attentif à l’environnement. « Je n’utilise la voiture que lorsque c’est absolument nécessaire, c’est-à-dire 3-4 fois par an. Pour le reste, je continue à tout faire en transports en commun. » « J’ai obtenu mon permis mais je n’ai pas conduit pendant dix ans », nous explique Laura. « Par contre, quand j’ai eu une opportunité de dingue pour un job qui demandait le permis, j’étais bien contente de l’avoir. Cela aurait été difficile de le passer en moins d’une semaine et je serais passée à côté de ce travail. Aujourd’hui, j’utilise beaucoup ma voiture mais j’envisage de déménager à nouveau dans un coin bien desservi en bus. A ce moment-là, je prendrai à nouveau les transports en commun. »

« La relation des jeunes avec la voiture a changé », confirme Benoit Godart. Au-delà du fait qu’ils sont plus attentifs à l’écologie, « la majorité des jeunes voient la voiture comme une grosse source de dépenses, entre le carburant, les assurances et le coût d’achat du véhicule. Ils optent donc pour la voiture uniquement quand c’est vraiment nécessaire pour eux. Dans ce cas-là, beaucoup ‘utilisent’ la voiture plutôt que d’en ‘posséder’ une. Ils privilégient le covoiturage et les voitures en libre-partage. »

Pas de regrets

Si Juliette ne compte pas passer le permis tout de suite, elle ne ferme pas totalement la porte. « Quand j’en aurai vraiment besoin, je le passerai. Je pense que je l’aurai avant mes trente ans, mais je prends mon temps parce que ce n’est pas ma priorité à l’heure actuelle. » La plupart des jeunes que nous avons interrogés reconnaissent l’utilité du permis. « Ma maman n’a pas passé le permis. Maintenant, elle a 55 ans et elle dépend des autres. Elle regrette de ne pas l’avoir passé », note Isabelle. « Si je ne l’avais pas passé, j’aurais été en difficultés », note Laura.

Pour George, 30 ans, passer le permis n’est toujours pas dans ses objectifs. « Je trouve la voiture stressante et désagréable. Je la vois comme une source de dépense sans réelle justification derrière. Je ne regrette pas mon choix. Tous les commerces et services sont à proximité de chez moi. Je dois parfois me débrouiller, parfois cela me prend plus de temps, mais j’y arrive toujours. Si ça s’avère nécessaire, je le passerai peut-être, mais même avec ça, ce n’est pas sûr car cela reste très cher… »