Belgique

Procès des attentats à Bruxelles: « La Belgique a réagi par la guerre contre l’État Islamique »

« Quand les militaires partent en avion bombarder la Syrie, c’est la guerre. L’État Islamique et la Belgique étaient en conflit armé », a soutenu Me Cohen. « Si le contexte n’est pas terroriste, on n’a pas d’infraction terroriste. »

Dans un long exposé, il est revenu sur diverses facettes du droit de la guerre, rappelant notamment que ce droit « ne punit pas le fait de faire des victimes dans le cadre d’un conflit armé ». L’avocat a également expliqué que le contexte entourant le début d’une guerre n’entre plus en ligne de compte pour juger les faits commis pendant la guerre. Il a ensuite illustré son explication avec la situation en Ukraine: « on pourrait penser que l’Ukraine n’est jamais coupable de crimes de guerre, car elle est toujours dans sa position de défense face à un envahisseur, mais cela n’est pas vrai pour le droit. L’Ukraine comme la Russie peuvent se rendre coupables de crimes de guerre. »

Insistant sur la nécessité de considérer les attentats du 22 mars comme le prolongement direct d’un conflit armé, l’avocat est revenu sur le cas d’Oussama Atar, seul accusé faisant défaut car présumé mort en Syrie: « on nous dit qu’il a été frappé par un drone. Dans quel cadre de droit pénal on pourrait abattre quelqu’un avec un drone? Il n’y a que dans la guerre que l’on peut faire ça. On exécute certains accusés avec les armes de la guerre, mais les autres accusés on les juge en droit pénal. »

L’avocat a encore cité un rapport du Comité international de la Croix rouge (CICR) dans lequel l’organisation considère que « le territoire d’un état impliqué dans un conflit fait aussi partie du conflit ». Pour revenir au cas des attentats du 22 mars 2016, l’avocat a affirmé: « il n’y a pas de guerre en Belgique, mais la Belgique avait engagé ses forces militaires et elle a ainsi pris le risque que le conflit arrive sur son territoire ».

En d’autres termes encore, Me Cohen a déclaré: « L’État belge a décidé d’aller attaquer un groupe armé dans le cadre d’un conflit armé et expose donc son territoire. Le territoire de la Belgique est devenu un territoire du conflit par l’intervention de la Belgique. Le parquet a dit: ‘nous pensons que la Belgique n’est pas un territoire de guerre’. C’est bien beau, mais il ne suffit pas de le penser. La question n’est pas de dire qu’il n’y a pas de guerre en Belgique mais de reconnaître qu’elle prend part à un conflit armé. »

L’avocat a, en outre, précisé qu’il ne s’agissait pas d’instrumentaliser les victimes dans une posture politique.

Me Nicolas Cohen s’est également défendu à plusieurs reprises de chercher à légitimer les attaques commises à Zaventem et dans la station de métro Maelbeek le 22 mars 2016. « Il n’y a rien à légitimer dans ces actes », a-t-il souligné. « J’espère que vous aurez compris que cette défense n’est pas indécente. Il est clairement recommandé d’appliquer le droit international humanitaire ».

Il a conclu sa plaidoirie en insistant sur l’importance de « désigner les crimes par leurs noms ». « La guerre c’est le chaînon manquant. Nier la reconnaissance du conflit, c’est empêcher de pouvoir le résoudre. Dire la guerre permet d’apporter la paix. »

Dès le début de sa plaidoirie jeudi matin, l’avocat a demandé la requalification des préventions pesant sur Bilal El Makhoukhi en complicité pour crime de guerre. Pour lui, même si une telle requalification n’engendre pas une peine inférieure, il est important que la cour établisse qu’El Makhoukhi a agi dans le cadre d’un conflit armé, au sein duquel il s’était engagé depuis plusieurs années, et non par pur désir de violence gratuite ou par haine absurde.