Belgique

”L’éducation sexuelle est essentielle dans le cadre scolaire”

D’abord, dès l’année prochaine, une animation Evras sera organisée au moins à deux moments de la scolarité des élèves en Fédération Wallonie-Bruxelles : en sixième primaire et en quatrième secondaire.

Ensuite, l’obligation de ces deux animations a minima est assortie d’un nouveau cadre. Les intervenants appelés à aborder les questions relationnelles, affectives et sexuelles avec les élèves sont désormais triés sur le volet. Seuls les centres PMS et PSE, les centres de planning familial et les opérateurs labellisés sont autorisés à intervenir.

Enfin, pour assurer une cohérence au niveau des contenus, un gros Guide de 300 pages a été rédigé à l’attention des professionnels, pour les aider à répondre aux questions posées par les élèves.

Depuis la polémique

On s’en souvient : quelques passages de l’ouvrage publié à l’époque sur le site de l’Evras avaient essuyé certaines critiques. Depuis la polémique, on n’entend plus parler ni du Guide, ni du sujet. Alors qu’est-ce qui se passe ?

“Nous avons intégré quelques modifications, explique Louise-Marie Drousil, co-rédactrice du Guide et coordinatrice depuis 2018 à l’ASBL O’Yes, un des opérateurs officiels de l’Evras. Il s’agit de quelques reformulations, précisions ou réorientations de certains thèmes dans d’autres catégories d’âge.” L’ouvrage a fait l’objet de nouvelles lectures attentives. Une réflexion est en cours concernant sa diffusion.

“L’objectif est de faire en sorte que tous les acteurs impliqués dans l’Evras puissent en disposer d’ici la fin de l’année scolaire.” Le grand public y aura-t-il aussi accès ? C’est l’un des points qu’il reste à trancher, explique la spécialiste.

École ou éducation familiale ?

Louise-Marie Drousil n’a aucun doute sur l’importance de l’Evras à l’école. “Bien sûr que deux rendez-vous obligatoires sur toute une scolarité, c’est peu. Mais vu d’où on vient, on avance ! Et puis c’est un minimum, donc rien n’empêche les écoles d’en faire davantage et de monter des projets particuliers.”

Pourquoi l’école, d’ailleurs ? Ces questions ne relèvent-elles pas de la sphère privée et donc, plutôt, de l’éducation familiale ? “L’Evras est essentielle dans le cadre scolaire, assure-t-elle. C’est le seul moyen pour que chaque jeune puisse y avoir accès et trouver des réponses à ses questions. Il faut qu’il y ait une base commune. Une partie de cette éducation se fait dans les familles, c’est vrai. Mais pas dans toutes…”

Le nouveau Guide pour une éducation à la vie relationnelle affective et sexuelle ne répond pas aux enjeux que rencontrent nos enfants

“Il faut pérenniser le dispositif”

La coordinatrice imagine son scénario idéal, dans un monde qui ne serait limité ni en budgets, ni en moyens humains : “L’Evras devrait systématiquement être intégré dans les projets d’établissements et des animations devraient être organisées au moins tous les deux ans afin d’assurer une certaine continuité. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Guide a été rédigé avec des informations par tranches d’âge.”

Louise-Marie Drousil côtoie beaucoup les jeunes autour de ces questions. Elle contredit ceux qui seraient tentés de croire qu’aujourd’hui, avec tous les canaux qui existent, tout le monde serait informé. “Mais non, justement. D’abord la qualité des informations qu’ils trouvent n’est pas garantie. Et puis rien ne remplace une personne auprès de laquelle le jeune peut se confier, parler de ce qui lui arrive, de ce qui le préoccupe, l’interroger…” C’est pourquoi elle insiste : “Il faut pérenniser le dispositif.”

“Tous les jeunes veulent de l’info”

En quelques années d’expérience, elle détecte en effet déjà une évolution positive. “Certains tabous ont été progressivement levés, rapporte-t-elle. Prenons le cas du consentement, par exemple. C’est très bien qu’on puisse en parler beaucoup et librement.” Cela dit, il reste du pain sur la planche.

“Les groupes que nous rencontrons ne sont pas homogènes, confie enfin Louise-Marie Drousil, évoquant même la nécessité ponctuelle d’une sorte de grand écart. Entre un élève qui paraît tout à fait à l’aise, intervient beaucoup et pose un tas de questions, et un autre visiblement gêné, il faut veiller à être là pour tout le monde.” Et surtout ne pas se fier aux apparences. “Tous les jeunes veulent de l’information, même ceux qui ont l’air de tout savoir ou semblent désintéressés.”