Belgique

Crise au PS bruxellois: « On a reproché à Philippe Moureaux d’être un grand dictateur, mais au moins il respectait les règles internes »

« On n’est pas à Moscou, on n’est pas en Corée du Nord”

Samedi matin, Rachid Madrane a quitté la salle, mécontent de la place qui lui était réservé sur les listes et fustigeant les “procédures” qui ont mené à leur confection. “La répartition des places sur les listes s’est faite dans l’entre-soi”, a-t-il lancé face aux militants. “On n’est pas à Moscou, on n’est pas en Corée du Nord”, a-t-il ajouté.

« On n’est pas en Corée du Nord ! »: c’est la guerre au PS bruxellois, Rachid Madrane renonce à être candidat aux élections

Le mécontentement de Rachid Madrane est-il isolé ? Les militants et élus socialistes se montrent assez discrets ce lundi matin. Selon les informations de la Libre, Rachid Madrane a toutefois été imité quelques minutes plus tard par une autre députée bruxelloise. “Oui, je suis sortie un peu après Rachid Madrane, en soutien à lui, mais aussi parce que j’étais triste pour mon parti. Il faut respecter la démocratie interne du PS bruxellois. Pour le reste, Rachid a tout dit…”, nous indique Véronique Jamoulle, députée bruxelloise.

”Beaucoup de gens soutiennent Rachid. J’ai reçu plein de messages d’amis qui ont toujours voté socialiste aux régionales et qui me disent : “Je suis désolé, mais moi je ne peux plus.”La manière récente de gérer les choses a fait des dégâts”, reprend la députée uccloise. “On a parfois reproché à Philippe Moureaux d’être un grand dictateur, mais au moins il respectait les règles… On désignait en bureau une tête de liste, nous désignions aussi les membres d’une commission de sages qui constituaient les listes après un appel à candidatures. Ici, on n’a rien eu, pas d’appel à candidatures, pas de réunion du bureau du parti pour constituer un comité des sages. La liste nous a été présentée en congrès sans même que cela ne passe en bureau de parti.”

La procédure des binômes, voulue par le président du PS Paul Magnette et le bureau national, a toutefois changé la donne, posant des difficultés nouvelles. “En général c’est un comité de liste (comité des sages) qui fait une proposition globale pour la liste complète, sauf les têtes de liste qui sont traditionnellement proposées par la présidence de la fédération”, concède un fin connaisseur du PS bruxellois. “Mais vu le caractère inédit de cette année, il appartenait à la présidence de la fédération bruxelloise de proposer les premiers et seconds des listes”.

Ces listes, précisons-le, ont été approuvées par les militants avec une quasi-unanimité, moins 3 non et 2 abstentions.

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Rachid Madrane avait une vision un peu différente d’Ahmed Laaouej, par rapport à la participation ou au communautarisme. »

La manœuvre a toutefois fait du dégât, ravivant les querelles intestines du PS bruxellois

Véronique Jamoulle, en 2019, avait en effet soutenu Rachid Madrane à la présidence de la Fédération bruxelloise du PS. “Rachid a perdu de très peu. La moitié des militants de Bruxelles soutenaient son projet, mais là, on n’en tient pas compte. Il avait pourtant une vision un peu différente d’Ahmed Laaouej, par rapport à la participation ou au communautarisme. Ahmed est une personne de pouvoir. Mais bon, il y en a dans tous les partis…”

Véronique Jamoulle s’était également signalée en juin lors de la proposition d’interdiction d’abattage sans étourdissement. La députée, à l’instar de Julien Uyttendaele, avait rejeté la consigne de vote d’Ahmed Laaouej, votant en faveur de l’interdiction.

Julien Uyttendaele rejette la consigne de vote du PS sur l’abattage rituel à Bruxelles : « Cette question n’a jamais été discutée en interne”

Je suis quelqu’un de loyal. Si ce point avait été dans le programme, qu’on en avait discuté en congrès, j’aurais pu accepter de voter contre ma conviction, au nom d’une décision collégiale. Mais il n’y a rien eu de tout ça, seulement une injonction qui venait d’en haut”, reprend Véronique Jamoulle qui l’assure : elle ne sera pas, à l’instar de Rachid Madrane, candidate aux élections de 2024

« Je ne veux plus cautionner certaines choses »

”Je ne serai pas sur les listes mais de toute façon, ils ne vont pas me le proposer car je ne suis pas dans les petits papiers. Et puis, j’aurai 65 ans en février. Ma décision était déjà prise avant le congrès. Je constate toutefois que beaucoup, parmi ceux qui partent avant la retraite, sont des femmes. Personnellement, je ne veux plus cautionner certaines choses. Je vais retourner dans l’associatif, comme bénévole. Cela demande un peu de courage mais je ne suis pas une héroïne non plus. Pour d’autres, c’est plus compliqué. Ce samedi, au congrès, j’ai vu des gens très mal à l’aise.