Suisse

Les élections «tacites» sont-elles un problème pour la démocratie?

Le décompte des voix pour les élections fédérales 2023 dans le canton d’Appenzell Rhodes-Intérieures, le plus petit canton de Suisse. Keystone/gaetan Bally

Le nouveau Parlement suisse compte un membre qui n’a plus eu à se soumettre à une élection depuis 2015. Cette année encore, le conseiller aux Etats obwaldien Erich Ettlin a retrouvé son siège à la Chambre haute sans que personne ne se présente pour le lui disputer. Est-ce un problème?

Ce contenu a été publié le 01 novembre 2023 – 08:57




Année Politique SuisseLien externe, l’annuaire de la politique suisse. Lorsque les partis se mettent d’accord entre eux pour savoir pour quels sièges ils se présentent, on pourrait qualifier cela de coterie. «Mais les petits partis d’opposition auraient toujours la possibilité de se présenter, déclare le politologue. Et ils ne s’en privent pas.»

Le choix comme condition de la démocratie

On peut toutefois aussi adopter une position critique du point de vue de la théorie démocratique, poursuit Marc Bühlmann. «L’une des conditions de la démocratie est la concurrence entre les partis et une sélection de personnalités qui se portent candidates pour chaque poste», estime-t-il. Cela n’a pas été le cas cette année à Obwald. «Si la Suisse était une démocratie purement représentative, sans votations où l’on peut exprimer son mécontentement, on pourrait donc même considérer cela comme assez autocratique du point de vue de la mesure empirique de la démocratie», souligne-t-il.

Marc Bühlmann est professeur à l’Université de Berne et directeur de l’Année Politique Suisse. zur Verfügung gestellt

Les «élections tacites» existent surtout pour la composition du Conseil des États, la Chambre haute du Parlement suisse, qui compte 46 membres. Presque chaque canton a ses propres règles pour déterminer quand il renonce à un tour de scrutin.

Et Marc Bühlmann de citer un exemple particulier: «Dans le canton d’Uri, il n’y a pas d’élection tacite, car il n’y a pas de délai d’inscription». Théoriquement, même si une seule candidature était présentée le dimanche des élections, une autre personne ayant le droit de vote pourrait être élue, si elle a été inscrite suffisamment de fois sur le bulletin.

Attention à l’excès de confiance

Dans le cas d’Obwald, l’histoire montre également ce qui peut arriver lorsqu’on est trop sûr de sa réélection. Au début des années 1980, le conseiller aux Etats et président du Conseil des Etats Jost Dillier avait intenté une action en justice contre des voix critiques. Lors des élections suivantes – à l’époque lors d’une landsgemeinde à main levée – la population s’en était souvenue et ne l’avait pas reconduit pour un quatrième mandat.   

Jost Dillier le jour de son élection à la présidence du Conseil des Etats, en décembre 1981; quelques mois plus tard, la population obwaldienne ne lui renouvelait pas sa confiance. Keystone / Str

La population d’Obwald surveille de près les personnes qui le représentent dans la Berne fédérale. L’actuel conseiller aux Etats Erich Ettlin en est conscient.

Relu et vérifié par Balz Ridendinger, traduit de l’allemand par Olivier Pauchard

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