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Habitué des polémiques, membre des « loups des combattants » : qui est Lu Shaye, l’ambassadeur chinois à Paris, qui défraye la chronique ?

Les réactions internationales condamnant ses propos n’ont pas tardé à fuser ce week-end, et l’intéressé a été convoqué par le Quai d’Orsay ce lundi.

Habitué des polémiques

En poste depuis trois ans à Paris, Lu Shaye est un habitué des polémiques et discours virulents. En France, il avait déjà été convoqué à deux reprises par le Quai d’Orsay pour des propos faux et provocants. Une première fois durant la crise du Covid-19 en 2020, après un tweet de l’ambassade de Chine accusant les soignants “d’abandonner les vieillards dans les Ehpad en les laissant mourir”. La deuxième fois pour s’en être pris au chercheur Antoine Bondaz sur Twitter, à propos de Taïwan. Il l’avait traité de “petite frappe” et de “hyène folle”.

L’entretien de ce lundi au Quai d’Orsay était d’ailleurs déjà prévu, avant la sortie de vendredi, rapporte Le Monde. Le ministère des Affaires étrangères français voulait faire une mise au point avec l’ambassadeur.

L’homme de 58 ans a auparavant travaillé au Sénégal et au Canada, où il a aussi fait parler de lui. Lu Shaye avait publié une tribune dénonçant “l’égoïsme occidental” et le “suprémacisme blanc”, en accusant les autorités canadiennes de ne pas se préoccuper de l’arrestation, au Canada, d’une responsable chinoise de Huawei. Il a aussi été maire adjoint de Wuhan entre 2014 et 2015.

« Loups combattants »

Ses derniers propos illustrent très bien la stratégie des “loups combattants”, un clan de diplomates chinois ne mâchant pas leurs mots face à un Occident perçu comme systématiquement hostile à Pékin, dont Lu Shaye fait partie. Ils se font remarquer par des discours agressifs, usant parfois de thèses complotistes, dès que l’image de la Chine est écornée à l’étranger. Leur cible principale : les Etats-Unis pour le monde occidental, mais aussi l’Inde et le Japon. Lu Shaye ne s’en cache pas : il avait même revendiqué en faire partie dans un entretien à l’Opinion, paru en juin 2021. “Je suis très honoré d’être qualifié de loup combattant, parce qu’il y a tant de hyènes folles qui attaquent la Chine”.

Ce nom de “loups combattants” est tiré d’un film d’action chinois de 2015 qui met en scène un agent des forces spéciales chinoises, joué par la star des arts martiaux Wu Jing, aux prises avec un ennemi occidental. L’ex-rédacteur en chef du Global Times – un quotidien nationaliste chinois –, Hu Xijin, est considéré comme l’inspirateur du groupe lorsqu’il avait décrit l’Angleterre comme “une chienne qui demande à recevoir des coups”.

Cette stratégie de “combattants” apparaît au début des années 2000, pour entrer dans la doctrine diplomatique officielle de la République populaire de Chine en 2020. Lorsque Xi Jinping arrive à la tête du Parti communiste chinois en 2012, les diplomates et les médias officiels sont appelés à “bien raconter l’histoire de la Chine” à l’étranger, afin de participer à faire retrouver sa puissance à l’Empire du milieu. Les diplomates deviennent alors des ”soldats” de la guerre diplomatique face à l’Occident. C’est ainsi que l’ancien porte-parole du ministère des Affaires étrangères avait accusé les États-Unis d’avoir provoqué l’épidémie de Covid-19.

Cette stratégie succède à “la diplomatie du panda”, apparue en 1949, lorsque ces animaux étaient utilisés comme symbole de rapprochement avec d’autres puissances. La chine offrait des pandas à des pays amis durant la guerre froide, lors de la signature d’accords économiques et commerciaux. Dans les années 1980, la consigne était de faire “profil bas”, avec la formule de Deng Xiaoping, ancien secrétaire du parti communiste : “cacher ses talents pour attendre son heure”.

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