France

Rennes : Hacker éthique, Clément Domingo a choisi « le camp du bien »

Cela fait presque deux ans qu’il n’envoie plus de SMS et ne répond pas aux appels sur son téléphone. « Je ne suis pas parano mais il y a des choses de base que je ne fais plus », souligne Clément Domingo. Pour communiquer, il préfère ainsi passer par d’autres canaux plus sécurisés. S’il se méfie du piratage de ses données, c’est que le trentenaire en connaît un rayon. Plus connu sous le nom de SaxX, cet ingénieur en cybersécurité est l’un des hackers français les plus célèbres. Mais pas n’importe quel hacker. « Je suis un hacker éthique », indique le Rennais, qui se bat pour redonner ses lettres de noblesse au hacking. « Les gens ont toujours une image négative des hackers, ils nous voient comme des cybercriminels, raconte-t-il. Mais il y a aussi plein de hackers qui nous protègent pour sécuriser notre démocratie. » C’est cette voie, « le camp du bien », que SaxX a choisi d’emprunter il y a quelques années.

Clément Domingo n’a pourtant pas le profil d’un geek. Né à Dakar au Sénégal, il a vécu « une enfance à l’africaine », élevé dans la foi et la religion par sa grand-mère. « Je n’ai touché à un ordinateur qu’à 17 ans quand je suis arrivé en France », raconte-t-il. En Afrique, c’est plus la musique qui le passionne, animant de nombreux mariages comme DJ. « C’est là que j’ai découvert l’esprit bidouille et débrouillard », assure-t-il.

« Une passion qui se transforme en mission »

Des prédispositions qui vont le conduire, une fois en France, à se passionner pour l’univers informatique. En BTS à Châteaulin (Finistère), il découvre auprès de ses camarades les jeux en réseau. Autodidacte, il apprend alors sur le tas à coder « pour gagner plus vite les parties ». Il découvre également à cette période le monde des hackers. Dans cet univers obscur, il a la chance de « tomber sur de bonnes personnes avec une déontologie ». « Mais peut-être que si j’étais tombé sur des personnes moins recommandables, j’aurai pu moi aussi basculer de l’autre côté », confie-t-il.

Cyber-justicier, SaaX se charge désormais de traquer sur le darkweb les cybercriminels « qui ont choisi la facilité et l’appât du gain ». Il a d’abord mis ses compétences au service de collectivités et d’entreprises pour les aider à détecter et corriger des failles avant que les cybercriminels ne les exploitent. « Mais hacker, c’est plus qu’une profession, c’est une passion qui se transforme en mission », indique SaaX. Avec d’autres hackers, il a ainsi lancé début 2022 l’ONG Hackers sans frontières pour apporter une aide technique aux ONG humanitaires touchées par des attaques informatiques. « On fait de l’humanitaire dans le cyberespace en offrant un bouclier numérique aux ONG », résume-t-il.

Au chevet du continent africain

Cofondateur du Breizh CTF, compétition de sécurité informatique qui se tient ce vendredi soir à Rennes (lire encadré), le hacker breton passe aussi désormais beaucoup de temps en Afrique. Sur son continent natal, il côtoie de hauts dirigeants pour les conseiller et les sensibiliser sur les questions de cybersécurité. « J’étais récemment au chevet d’un organisme d’État en Afrique de l’Ouest qui a été victime d’un ransomware », indique-t-il, préférant rester discret sur le contenu de ses missions et le nom de ses clients.

Dans quelques semaines, il prendra également la direction du Luxembourg pour sensibiliser des jeunes au cyberharcèlement et leur présenter son métier. Hacker à plein temps, SaxX arrive tout de même de temps à temps à décrocher des ordis. « J’adore cuisiner et je continue à mixer, raconte-t-il. Ce sont un peu des sas de décompression qui m’aident à trouver un équilibre. »