France

Réforme des retraites : Face au mur, Elisabeth Borne peut-elle reprendre la main ?

Après la crise, la sortie de crise ? Fragilisée par la contestation contre la réforme des retraites, Elisabeth Borne vise la remontada. La Première ministre a ouvert lundi une séquence de consultations sur trois semaines avec les parlementaires, les partis politiques, les représentants d’élus locaux et les partenaires sociaux. 

Alors qu’a lieu ce mardi une nouvelle journée de contestation, la cheffe du gouvernement a dit vouloir « apaiser le pays » et « dialoguer avec tous les acteurs sur la méthode », dans un entretien diffusé dimanche soir par l’AFP. Mais peut-elle vraiment reprendre la main ? On revient sur les difficiles défis qui attendent Elisabeth Borne.

Rassurer sa majorité (et Emmanuel Macron)

Premier étape du plan de bataille : rassurer le camp présidentiel. Après des semaines de négociations avec la droite pour obtenir une majorité à l’Assemblée, Elisabeth Borne a finalement usé du 49.3 pour faire adopter le texte sur les retraites. Un échec personnel qui a entraîné des doutes sur son avenir, jusque dans son propre camp. « Elle s’est bagarrée jusqu’au bout dans un contexte difficile. Est-ce que c’est de sa faute ? Ce n’est pas à moi de le dire… », s’interrogeait notamment le député Renaissance Pierre Cazeneuve.

Pour dissiper les doutes, la Première ministre a donc imaginé « un plan d’action » pour les prochaines semaines. Un agenda présenté ce lundi midi à Emmanuel Macron, puis aux cadres macronistes, dont les patrons de groupes parlementaires, les chefs de partis et quelques membres de gouvernement. « Je suis au travail et à l’écoute […] On veut vraiment mettre la priorité sur quelques sujets pour obtenir rapidement des résultats concrets pour les Français », a-t-elle résumé à l’AFP.

Niveau de difficulté : intermédiaire

Si elle semble avoir laissé des plumes dans la séquence sur les retraites, Elisabeth Borne garde toujours la « confiance » d’Emmanuel Macron. Un répit de plusieurs semaines non négligeable pour espérer regagner la confiance de ses troupes.

Elargir la majorité présidentielle

Lors de sa prise de parole mercredi dernier, le chef de l’Etat a aussi demandé à sa Première ministre d’ « élargir » la majorité présidentielle. Elisabeth Borne a prévenu dimanche qu’elle ferait tout pour s’éviter une nouvelle crise politique : « La méthode que je fixe pour l’avenir c’est : pas de 49.3 en dehors des textes financiers », a-t-elle assuré, alors que la Constitution ne prévoit déjà qu’une utilisation de cet outil par session parlementaire en dehors du budget.

Mais elle entend surtout montrer que les consultations tous azimuts visent à trouver des alliés, notamment à droite de l’hémicycle. « L’objectif est de continuer à rassembler autour d’une majorité de progrès. On l’a fait avec la droite sur le pouvoir d’achat, et avec la gauche sur les énergies renouvelables notamment ; on va continuer », confirme Prisca Thévenot, députée des Hauts-de-Seine et porte-parole de Renaissance.

Niveau de difficulté : élevé

Depuis le début de la législature, « 11 projets de loi ont été définitivement adoptés et 12 propositions de loi », alors que le 49.3 n’a été utilisé que « sur trois textes uniquement », a précisé la Première ministre. Mais Les Républicains, fragilisés par leurs bisbilles internes, ont déjà indiqué qu’ils ne feraient désormais aucun cadeau à Elisabeth Borne.

Ramener les syndicats à la table

Elisabeth Borne a également tendu la main aux syndicats. La Première ministre espère reprendre le dialogue dans le cadre d’une future loi Travail. « Il faut qu’on trouve le bon chemin […] et que l’on puisse reprendre le travail sur tous ces chantiers » de la pénibilité, des reconversions professionnelles. Elle indique avoir même trouvé une place dans son agenda pour rencontrer les organisations syndicales et patronales la semaine du 10 avril.

Mais les représentants syndicaux n’ont pas vraiment accueilli chaleureusement l’invitation. Le leader de la CFDT, Laurent Berger, a de nouveau prévenu  lundi qu’il n’accepterait « la main tendue » d’Elisabeth Borne que si le gouvernement marque une pause, en « mettant de côté pour l’instant la réforme ». La CGT se montre encore plus inflexible, même si la centrale devrait connaître quelques jours de flottement avant la désignation vendredi de son futur chef, en remplacement de Philippe Martinez.

Niveau de difficulté : très élevé

Ramener l’ensemble des syndicats autour de la table s’annonce aujourd’hui très difficile, alors que la contestation contre les retraites ne faiblit pas dans la rue. En affirmant qu’aucun syndicat n’avait proposé de « compromis » à l’exécutif sur ce texte, Emmanuel Macron n’a d’ailleurs pas vraiment aidé sa Première ministre.