France

A Mandelieu et Monaco, on peut s’abonner à un yacht pour 2.900 euros par mois…

« En cinq ans, les prix des bateaux neufs ont été multipliés par 1,5. Et, a priori, ces augmentations ne vont pas s’arrêter. » C’est sur ce constat et parce que « 75 % des aspirants acquéreurs renonceraient finalement à passer le cap », qu’Anthony Brisacq ambitionne de révolutionner le yachtisme. Neoyot, la société que cet Azuréen de 48 ans lance avec son fils Mattéo, 21 ans, suit le concept « N’achetez plus, abonnez-vous ». Comme pour de plus en plus de services, de streaming, de courses, de livraison… Mais pas au même prix. Pour celui-là, il faudra au moins compter 2.900 euros par mois. Hors taxes.

Anthony et Mattéo Brisacq sont à la tête de Neoyot
Anthony et Mattéo Brisacq sont à la tête de Neoyot – Neoyot

« Les comportements changent. L’abonnement casse les marchés en offrant de nouveaux moyens de consommer, de consommer plus. Ça marche déjà pour les jets privés et on est certains que cela peut également fonctionner sur cet autre secteur haut de gamme. On veut simplifier l’accès aux yachts, explique l’entrepreneur. Aujourd’hui, il faut être un peu cinglé pour en acheter un, entre le coût d’entrée, au moins 800.000 euros, l’entretien qui représente une fortune, les places de port à trouver et les contraintes liées à la gestion d’un équipage. On dit souvent qu’on est heureux deux fois avec un bateau : quand on en fait l’acquisition et quand on le revend. »

Jusqu’à 8.750 euros hors taxes par mois pour un 20 m

Anthony Brisacq sait de quoi il parle. Cet homme aux deux vies, qui a commencé par les planches des théâtres à Paris, où il était metteur en scène, travaille depuis plus de vingt ans sur celles des ponts des bateaux, depuis la Côte d’Azur mais aussi à Miami ou en Asie. Cet « autodidacte passionné » a d’abord créé MYS (Mediterranean yacht services), une société monégasque de vente et de gestion avant d’innover une première fois, en 2015, avec Yachtster, une appli de location en temps réel.

Avec Neoyot, plus question de location. Les usagers qui pourront se payer le service se partageront en fait leur yacht, à quai entre Mandelieu, près de Cannes, et Monaco, avec quatre autres abonnés, qui devront chacun débourser entre 2.900 euros hors taxes par mois, pour une embarcation de 12,5 m, et 8.750 euros hors taxes, pour 20 m. Pas pour tout le monde donc et avec douze mois d’engagement, comme pour les forfaits téléphoniques.

« A ce prix-là, tout est inclus, l’équipage, l’entretien, la gestion dans son entièreté. Il y aura même un service palace, qui permettra à tous les utilisateurs de retrouver leurs habitudes, les équipements de loisirs, de plongée à la même place où ils les auront laissés, précise Anthony Brisacq. Il leur faudra juste ajouter le prix du carburant et de la nourriture qu’ils consommeront, précise le patron. Pour un coût global 5 à 7 fois inférieur qu’en achetant un yacht pour un seul inscrit, et pour à peu près le même temps d’utilisation. » Soit 30 à 40 jours par abonné.

Des industriels, des traders et des retraités de la finance

Avec tout de même une contrainte. « Il n’est évidemment pas envisageable qu’une même personne bloque un bateau sur 30 jours consécutifs au mois d’août. On ne peut pas l’utiliser de manière intensive. Mais tout ça va se faire en bonne intelligence. » Une application permettra aux « Neoyoters » d’avoir une vue sur le calendrier et de réserver leurs créneaux. Pour plus de souplesse, avant le lancement effectif du service le 1er juin, l’entreprise s’emploie actuellement à « construire des puzzles » avec « les nombreuses candidatures » déjà reçues.

Des industriels, des traders mais aussi des retraités de la finance sont sur les rangs. « Et il ne faut pas mettre que des actifs sur le même bateau pour éviter de limiter la disponibilité sur le week-end uniquement », précise le boss. Trois embarcations, financées par des investisseurs, seront mises en circulation dans quelques semaines. Et le parc de Neoyot grandira progressivement, avec six autres yachts déjà commandés pour 2024, mais également d’autres implantations de l’entreprise en prévision, notamment du côté de Miami.

« Ce nouveau modèle, s’il est bien suivi, devrait permettre à beaucoup plus de plaisanciers de prendre la mer », anticipe Anthony Brisacq. Le trafic, déjà compact sur la Côte d’Azur en haute saison, devrait donc « mécaniquement encore augmenter ». « Nous adhérons à plusieurs chartes pour adopter les comportements les plus responsables en n’utilisant par exemple que des biocarburants. Nous aurons un rôle écologique à jouer », reconnaît-il.