France

A l’Eurovision, l’Espagne présente une chanson « différente et risquée »

De notre envoyé spécial à Liverpool (Royaume-Uni)

Trois minutes envoûtantes. C’est ce que proposera Blanca Paloma en finale de l’Eurovision, samedi soir, à Liverpool. « On a voulu créer une atmosphère mystérieuse, de rituel, de catharsis », explique l’Espagnole à 20 Minutes. Sa chanson Eaea, est un hommage à sa grand-mère Carmen.

Les franges écarlates flottant au-dessus de la scène sont « le plus important » de la scénographie. Elles symbolisent les fils du châle que son aïeule portait sur les épaules. « C’est comme si elle me faisait un câlin et m’accueillait dans un espace où je me sens protégée, poursuit Blanca Paloma. Au début de la performance, vous voyez ma fragilité et, au fur et à mesure, vous me voyez gagner en confiance, en courage. »

Aussi, son passage sur scène, inspiré par l’esthétique de films de Carlos Saura « qui a su mettre en valeur la culture espagnole », a des allures mystiques. « L’idée est d’invoquer nos ancêtres, particulièrement les femmes, pour apporter leur message au présent, l’inclure dans la musique, dans l’art, et le transmettre aux futures générations en leur rappelant l’héritage de celles qui nous ont précédées. Grâce à leurs luttes, nous sommes plus libres, nous avons davantage de droits, c’est une manière de les honorer », complète l’artiste de 33 ans.

« C’est une chanson que je juge nécessaire »

« Mon enfant quand je mourrai, qu’on m’enterre sur la Lune et toutes les nuits je te verrai. (…) Ah, mon enfant, mon petit enfant, enfant de mes amours, que toutes les nuits m’illuminent de tes yeux ensoleillés », chante-t-elle dans cette comptine qui mêle le flamenco à des sonorités plus électro, contemporaines, qui confèrent à l’ensemble force et étrangeté.

« Ce sont des ingrédients auxquels je m’identifie, ainsi que les Espagnols et, je l’espère, également les Européens. C’est une chanson que je juge nécessaire car elle est une manière d’exprimer nos racines. Elle est différente et risquée », estime Blanca Paloma.

Elle sait que sa chanson n’est pas grand public et n’entre pas forcément dans les canons de l’Eurovision. Mais elle s’inscrit dans la lignée d’un Salvador Sobral, le Portugais vainqueur en 2017, ou d’une Barbara Pravi, qui a offert à la France une deuxième place au concours en 2021. « La présence d’artistes non mainstream est importante pour la diversité du concours, souligne-t-elle. Il faudrait que cela insiste d’autres artistes dans ces registres-là à se présenter. »

« J’ai peut-être quelque chose à apporter à l’Eurovision »

La vingtenaire se retrouve à Liverpool après avoir remporté, début février, le Festival de Benidorm, la sélection nationale de l’Espagne pour l’Eurovision. Elle y avait déjà pris part l’an passé, et avait fini cinquième avec Segreto de agua. « Ce n’est pas moi qui avais fait la démarche d’y aller. J’ai été appelée », raconte-t-elle. Sa chanson atmosphérique était le générique d’une série documentaire à succès Lucía en la telaraña.

« Quand la vie me propose une telle opportunité, j’aime y réfléchir en me disant que j’ai peut-être quelque chose à apprendre de cette expérience. Je pense que j’ai peut-être aussi quelque chose à apporter à l’Eurovision, à la musique, c’est pourquoi j’ai candidaté à Benidorm avec Eaea. C’est une chanson qui représente qui je suis, en tant que femme et artiste. »

La victoire, elle admet y penser, « forcément ». Mais Blanca Paloma se prépare « à tous les scénarios ». « Je n’ai imaginé être artiste », glisse celle qui, enfant, n’avait « pas de salle de jeu, mais une salle de musique avec des cassettes et des vinyles ». « La musique m’a appellée et me voilà », sourit-elle. Comme si tout était écrit et que, de là-haut, une bonne étoile veillait sur sa destinée.