Belgique

Mais qui est Sander Loones, le poil à gratter de l’opposition qui pourrit la vie de la Vivaldi ?

Ce juriste diplômé de la KU Leuven, expert en affaires constitutionnelles et finances, a un talent particulier pour détecter les dysfonctionnements et flairer les embrouilles, ou ce qui passe sous les radars. Au moment opportun, il passe à l’action. Il connaît ses dossiers sur le bout des doigts. Ses interventions sont bien préparées, ses analyses coulées dans le béton. Ses investigations sont aussi redoutables que redoutées. Cerise sur le gâteau : il est tenace et ne lâche pas la proie pour l’ombre.

La première victime

Sarah Schlitz n’est pas sa première victime. L’éphémère ministre de la Défense – du 12 novembre au 9 décembre 2018 – a aussi eu le scalp d’une autre secrétaire d’État, libérale celle-là. Eva De Bleeker (Open VLD), alors en charge du Budget, fut la première victime du député zélé. La députée libérale du Brabant flamand a été contrainte à la démission le 18 novembre dernier, emportée par des erreurs dans le projet de budget fédéral 2023 que seuls Sander Loones et sa collaboratrice semblaient avoir vues.

Dans cette affaire, le député nationaliste avait décelé une erreur flagrante : il y avait une différence de 1,7 milliard entre les chiffres budgétaires présentés par Alexander De Croo et ceux transmis par la secrétaire d’État à la Chambre. Avec une rare persévérance, certains diront de l’acharnement, le nationaliste flamand a réussi à localiser ce que l’on a d’abord présenté comme des “erreurs matérielles” de comptabilité entre le cabinet du premier ministre et le cabinet de la Secrétaire d’État.

Le “logogate” qui a coûté son poste à l’écologiste Sarah Schlitz constitue un nouveau psychodrame qui nuit sérieusement à la crédibilité du gouvernement fédéral. Et c’était sans doute le but recherché par son instigateur. Sander Loones n’a d’ailleurs pas hésité à charger personnellement le Premier ministre Alexander De Croo. La semaine dernière, il avait déclaré dans l’hémicycle : “Vous avez congédié une secrétaire d’État qui avait présenté un budget en disant la vérité. Mais une secrétaire d’État qui a menti au parlement, vous ne bronchez pas. Quelle erreur !”.

La réaction de Sander Loones (N-VA) après l’annonce de la démission de Sarah Schlitz

Le “budget désastreux” de De Croo

Avec assiduité et détermination, le poil à gratter de la Vivaldi a bien l’intention de poursuivre son “grand dessein.” Après l’annonce de la démission de Schlitz, intervenue mercredi matin, il s’est empressé d’enfoncer le clou. Le député a saisi l’occasion pour égratigner une fois de plus le gouvernement fédéral en affirmant qu’il ne voyait pas la nécessité de remplacer la démissionnaire. “Un ministre en exercice peut reprendre ses fonctions en toute sécurité au cours de la dernière année de la législature. La politique montre ainsi qu’elle peut aussi s’économiser. Cela profiterait au budget désastreux de De Croo”, a-t-il déclaré.

Cette fine lame de la N-VA a commencé à se faire un nom en politique comme député européen de 2014 à 2018, un mandat qu’il a occupé en remplacement de Johan Van Overtveldt désigné ministre des Finances au gouvernement fédéral. Fin 2018, Sander Loones a remplacé Steven Vandeput – devenu bourgmestre de Hasselt – comme ministre de la Défense. Il quittera cependant ce poste quelques semaines après y avoir été installé, son parti ayant décidé de quitter le gouvernement fédéral pour marquer son refus d’avaliser le Pacte de Marrakech.

L’élu d’Oostduinkerke marche dans les pas de l’eurodéputé et ancien ministre-Président flamand Geert Bourgeois, ouest flamand comme, lui. On le dit proche du patron, Bart De Wever. Avec Theo Francken, Joachim Pohlmann, Mathias Diependaele et quelques autres, il trace son sillon, lentement mais sûrement, dans l’appareil. Son horizon ? Les élections de 2024. Il espère convaincre ses électeurs et… les francophones du bien-fondé d’un État confédéral, seule issue pour réformer la Belgique.

Congrès de la N-VA

Sander Loones est une étoile montante au firmament nationaliste. Il attend son heure. Lors de la négociation gouvernementale de 2014, il était déjà vice-président de la N-VA. Il formait un solide tandem avec le président Bart De Wever dont il fut aussi le sherpa. Le boss l’aurait même désigné pour prendre les commandes du parti nationaliste au cas où…

Sander Loones (N-VA) : « La Belgique est un handicap pour la Wallonie”

Sander Loones affirme avoir apprivoisé sa part d’ombre pour ne plus la subir. En clair : il prétend s’être réconcilié avec le passé collaborateur de son grand-père qui fut bourgmestre d’Oostduinkerke et d’Ostende. Ce dernier a été membre du Vlaams Nationaal Verbond (Ligue nationale flamande), organisation fasciste collaborant avec l’ennemi. Son père, Jan, fut député Volksunie et échevin jusqu’en 2018. En tout état de cause, la question de la collaboration des nationalistes flamands durant la Seconde Guerre mondiale reste enfouie dans la mémoire de nombreuses familles. Ce qui n’empêchera pas ce militant nationaliste de la première heure de peser de tout sur poids sur le congrès des membres de la N-VA qui se tiendra du 12 au 14 mai à Anvers.