Belgique

Avec ces 3 dossiers, le CD&V lance la contre-attaque au fédéral mais fait grincer des dents

Au sein du gouvernement De Croo, les chrétiens-démocrates flamands montrent les dents. Depuis quelques jours, les représentants du CD&V bousculent l’actualité.

Premier dossier. La semaine dernière, Vincent Van Peteghem, ministre des Finances, a lancé un bon d’État qui fait un carton. Par cette décision qui offre une alternative aux carnets d’épargne, l’État pourrait récolter jusqu’à 20 milliards d’euros. Un record. Mais le dossier fait grincer des dents certains partenaires de majorité : le ministre ne les a pas consultés avant de fixer le taux de rémunération des investisseurs (un coupon de 2,81 net %).

Vincent Van Peteghem, le ministre qui ne pouvait pas réformer.

Second dossier. Ce week-end, la ministre de l’Intérieur, Annelies Verlinden, s’est impliquée dans une opération policière d’envergure à la gare du Midi à Bruxelles. Cette action “coup de poing” a mobilisé les forces de police pour sécuriser un quartier en proie à la délinquance.

Troisième dossier. Mardi, Nicole de Moor, secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration, a annoncé que la Belgique suspendait l’accueil des hommes seuls demandant l’asile. Cette mesure unilatérale, bien que temporaire et relevant de ses compétences fonctionnelles, a provoqué du remous au sein de la coalition fédérale. Pour Georges Gilkinet, vice-Premier ministre Écolo, cette décision est “extrêmement problématique” car elle pourrait contraindre des migrants à dormir dehors cet hiver. Nicole de Moor a expliqué sa décision par la nécessité de réserver des places d’accueil pour les familles et les enfants.

Le coup de force des ministres CD&V

Trois ministres CD&V, trois décisions fortes qui marquent les esprits… Sans doute, ces actions répondaient à de réels besoins en termes de mobilisation de l’épargne, de sécurisation des quartiers chauds de la capitale et d’anticipation des besoins hivernaux en matière d’asile. Mais on peut également décoder plus politiquement cette intense séquence qui a propulsé les chrétiens-démocrates à l’avant-scène médiatique.

Le CD&V, on le sait, est en difficulté dans les sondages (sous la barre des 10 % d’intentions de vote). Pour l’instant, le président Sammy Mahdi, malgré son style offensif, n’arrive pas à faire remonter la pente à sa formation politique. Pour ne rien arranger, les chrétiens-démocrates sont peu visibles au fédéral. À quelle réforme d’envergure peuvent-ils accrocher leur sigle politique ? La réponse n’est pas évidente…

La grande réforme fiscale voulue par le vice-Premier ministre Vincent Van Peteghem a buté, cet été, sur les désaccords politiques opposants l’aile gauche et l’aile libérale de la coalition. Le Premier ministre Alexander De Croo (Open VLD) l’a rappelé cette semaine : après l’impasse de cet été, il ne juge pas opportun de rouvrir les négociations. Le trophée qu’espérait le CD&V lui passe sous le nez.

L’introuvable réforme fiscale… n’est pas près d’être trouvée. Analyse

”Compenser les gros bobos de la réforme fiscale”

Il fallait donc réagir… Les ministres chrétiens-démocrates ont ainsi montré leurs griffes. Mais ce tir groupé fait grincer des dents et électrise les partenaires vivaldiens. “Le taux du bon d’État, la ‘solution’ pour la gare du Midi et maintenant l’asile… Cela fait trois points qui ont fait l’actualité où il n’y a pas eu de concertation de la part du CD&V, peste un informateur fédéral. On a l’impression qu’une carte blanche a été donnée au CD&V de peur qu’il débranche la prise… On sent bien que ces dossiers sont autant de petits cadeaux destinés à compenser les gros bobos de l’échec de la réforme fiscale. Cela commence à faire gros. Sur l’asile, rien que sur le plan juridique, on n’a pas été consulté, il n’y a pas eu d’intercabinets (une réunion des chefs de cabinets des vice-Premiers ministres devrait aborder ce point ce jeudi). On avance à l’aveugle.

guillement

On a l’impression qu’une carte blanche a été donnée au CD&V de peur qu’il débranche la prise… »

Le CD&V semble vouloir se refaire une santé, quitte à bousculer le gouvernement De Croo alors qu’un douloureux conclave budgétaire se profile en octobre. Tout comme les libéraux flamands de l’Open VLD, les chrétiens-démocrates jouent leur survie aux prochaines élections. La montée du Vlaams Belang laisse de moins en moins d’espace aux partis traditionnels. Quant à la N-VA, dans l’opposition au fédéral, elle rêve de s’allier à ce qu’il reste de l’aile droite de l’Open VLD et du CD&V en vue des élections de juin 2024. Cette grande alliance conservatrice, destinée à contrer l’extrême droite, selon Bart De Wever, aurait aussi pour effet collatéral de précipiter la fin du parti libéral et du parti chrétien-démocrate.

Dans ces circonstances plombées, le “réveil” des ministres CD&V, jugés trop discrets, s’imposait…

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