Suisse

La Suisse abandonne l’Initiative de Genève, mais pour quelle alternative?

La zone de Jérusalem-Est est très disputée. Comme ici le quartier de Har Homa, qui surplombe la ville biblique de Bethléem en Cisjordanie, photographié en 2007. 2007 Getty Images

Vingt ans après son lancement, la Suisse a tourné la page de l’Initiative de Genève. Elle estime que le contexte politique international a radicalement changé et que le moment est venu d’adopter une autre approche «plus innovante et plus efficace».

Ce contenu a été publié le 04 août 2023 – 16:30




sa contribution est passée de 1 million de francs en 2009 à 180.000 francs en 2021Lien externe – a mené à un manque de volonté d’implémentation sur place.

Selon un expert qui collabore sur des projets avec le DFAE et préfère rester anonyme, l’Initiative démontre «la naïveté et la méconnaissance de la Suisse des dynamiques locales qui dominent le Proche-Orient». Le texte pariait sur la société civile et sur un relais des opinions publiques israéliennes et palestiniennes qui n’a jamais eu lieu.

Désengagement de la Suisse

Une nouvelle évaluation de l’Initiative par la Suisse, en 2020, a conclu que son efficacité avait diminué en raison de son manque de soutien politique en Israël comme en Palestine. En janvier 2022,  le DFAE décide de se désengager financièrement de cette initiative à la fin de 2023Lien externe.

Le ministère des Affaire étrangères annonce alors une nouvelle stratégie pour la promotion de la paix et le développement au Moyen-Orient et en Afrique du Nord qui prendra le relais en 2023. Berne envisage également de déménager le siège de la coopération suisse de Jérusalem à Ramallah, comme l’exigent les Israéliens.

Micheline Calmy-Rey avec le président palestinien Mahmoud Abbas, à Ramallah, en octobre 2005. Reuters / Loay Abu Haykel

La Suisse insiste sur le fait que la fin définitive de l’Initiative ne signe pas son désengagement de la région. La Confédération continuera de dépenser 1,8 millions de CHF par année pour la promotion de la paix et des droits de l’homme. «La recherche d’une solution politique au conflit au Moyen-Orient est une priorité de la stratégie MENA (Moyen Orient et Afrique du Nord) 2021-2024 du Conseil fédéral», souligne Andreas Heller, porte-parole du DFAE:

De plus, la Suisse a créé un nouveau poste pour «promouvoir des solutions concrètes dans la région», avec la nomination d’un envoyé suisse pour le Moyen-Orient. Cet envoyé spécial ne remplacera pas les ambassadeurs régionaux sur place.

La Suisse absente

Une politique largement critiquée par les experts et les ONG, qui reprochent à la Suisse un changement de cap de sa politique étrangère dans la région. La décision de transférer le bureau de coopération de Jérusalem à Ramallah peut être «interprétée comme une reconnaissance implicite de l’annexion de Jérusalem-Est par l’Etat d’Israël», estime Nago Humbert, fondateur de Médecins du monde Suisse.

La déclaration d’Ignazio Cassis, alors ministre des Affaires étrangères, lors d’un voyage dans la région en 2018, va dans le même sens lorsqu’il déclare à la presse: «Tant que les Arabes ne sont pas prêts à accorder à Israël le droit d’exister, Israël se sent menacé dans son existence et se défendra». 

Pour Alexis Keller, la politique actuelle de la Suisse au Moyen-Orient «masque l’opacité de la politique étrangère suisse, car si la Suisse mise sur l’humanitaire et l’aide au développement, elle revient à ce qu’elle faisait avant l’Initiative de Genève, soit ne pas faire de politique dans une région où tout est politique». 

Texte relu et corrigé par Virginie Mangin

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