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Pourquoi il faut se méfier de l’annonce du chef de Wagner: « Il a peut-être affirmé cela avec la bénédiction du Kremlin »

Des propos qui ont interpellé le reste du monde, d’autant plus que Vladimir Poutine ne s’est pas exprimé en ce sens. Evgueny Prigojine souhaite-t-il vraiment mettre un terme au conflit? Rien n’est moins sûr, affirme Roger Housen, conseiller en Stratégie pour la Centrale Générale du Personnel Militaire (ACMP-CGPM), un syndicat militaire indépendant. Selon lui, le patron de Wagner ne parle pas d’un cessez-le-feu ou de négociations entre Poutine et Zelensky. « Il veut un statut-quo et pas la fin de la guerre », analyse Roger Housen auprès de Het Laatste Nieuws, faisant d’abord référence à un passage du texte de Prigojine où il énonce les « victoires » de la Russie: « Chers partisans, chers Russes, nous avons atteint le point où une grande partie de la population ukrainienne masculine a été éliminée ou a fui à l’étranger. Nous avons installé un corridor terrestre de la Crimée à la mer d’Azov. Nous avons paralysé l’Ukraine sur le plan économique, le pays ne pouvant survivre que grâce à la perfusion financière de l’Occident. En résumé, nous avons obtenu tout ce que nous voulions. Désormais, consolidons cela ». Pour le représentant du syndicat militaire, cette dernière phrase démontre bien que le patron de Wagner désire que les choses s’arrêtent en l’état et non pas que la Russie retire ses troupes d’Ukraine.

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Mais en quoi l’arrêt de « l’opération spéciale » de Poutine serait une bonne chose pour Evgueni Prigojine, qui combat depuis le début de la guerre aux côtés des Russes? « C’est de l’opportunisme », déclare Roger Housen. Il rappelle que depuis janvier, Evgueni Prigojine n’est plus aussi soutenu par le Kremlin qu’au début de la guerre. En effet, Poutine a rappelé Valeri Guerassimov dans les hautes sphères pour lui attribuer le pose de commandant du “groupement combiné de troupes” déployées en Ukraine, à la place du général Sergueï Sourovikine. Ce dernier s’entendait très bien avec Prigojine, ce qui conférait au patron de Wagner un certain pouvoir d’action et une certaine autonomie de décision en ce qui concerne le conflit. Mais les choses ont changé avec l’éviction de Sourovikine, explique Housen: « Le traitement de faveur accordé à Wagner a pris fin avec la nomination de Valeri Guerassimov. Depuis lors, Prigojine est coincé. Alors pourquoi faire la guerre s’il ne peut plus récolter l’honneur et les lauriers? ».

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Mais Prigojine veut-il pour autant défier les projets de Vladimir Poutine avec son long discours? Pour le conseiller en Stratégie pour l’ACMP-CGPM, les déclarations d’Evgueni Prigojine plaisent au contraire sans doute au Kremlin. Et il avance même une théorie: « Je ne serais pas surpris qu’il ait dit tout cela avec la bénédiction du Kremlin. Je songe par exemple au secrétaire du Conseil de sécurité de la Russie, Nikolaï Patroeshev ». « Le message de Prigojine qui affirme ‘Nous avons déjà conquis de grands territoires ukrainiens, maintenant défendons surtout ce que nous avons’ convient très bien à Moscou », conclut Roger Housen.