France

Toulouse : Une pédopsychiatre à nouveau suspendue après avoir fait un signalement

« C’est une peine lourde et disproportionnée, ils s’acharnent sur moi depuis huit ans alors que j’ai juste essayé de protéger une enfant. » Eugénie Izard, une pédopsychiatre toulousaine, vient d’être à nouveau condamnée à trois mois d’interdiction d’exercice de la médecine, dont un avec sursis, par la chambre disciplinaire nationale du conseil national de l’Ordre des médecins « pour immixtion dans les affaires de famille ».

En 2014 et 2015, cette praticienne avait fait des signalements, s’inquiétant d’une possible maltraitance à l’encontre d’une petite fille de 8 ans qu’elle suivait. Elle s’était alors adressée au procureur de la République et à la juge des enfants déjà en charge de la protection de la petite fille. Mais aussi au Président du conseil départemental en charge du recueil des informations préoccupantes du département.

Le père de l’enfant avait alors entamé des poursuites à l’encontre de la pédopsychiatre, avant de retirer sa plainte. Mais le conseil de l’Ordre du 31 a continué à poursuivre Eugénie Izard sans plaignant. La chambre disciplinaire nationale l’avait condamnée en décembre 2021 devant le conseil de l’Ordre pour « immixtion » et « violation du secret professionnel » à une interdiction d’exercer durant trois mois.

Un jugement cassé en mai dernier par le conseil d’Etat pour qui « la seule circonstance que ce signalement ait été adressé au juge des enfants (…) ne saurait, à elle seule, alors que le juge des enfants était déjà saisi de la situation de cet enfant, caractériser un manquement » au Code de la santé publique.

Nombreux soutiens pour les « médecins protecteurs »

En novembre dernier, aux côtés d’une autre pédopsychiatre, la médecin toulousaine avait à nouveau été entendue par la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre, soutenue ce jour-là par de nombreuses associations de protection des enfants. Mais aussi par le Syndicat de la médecine générale, plaidant que les deux praticiennes n’avaient « fait que leur travail et répondu à leurs obligations de médecins et de citoyennes en signalant des enfants qu’elles avaient évalués en danger ». A l’instar de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants, le syndicat préconise de protéger les « médecins protecteurs » et que cette mesure soit inscrite dans la Loi.

Malgré ce mouvement de soutien, la chambre disciplinaire a donc prononcé une nouvelle condamnation d’Eugénie Izard en cette fin de mois de janvier. Cette dernière a d’ores et déjà indiqué qu’elle allait faire appel. « L’article 226-14 du Code pénal dit que le signalement aux autorités compétentes ne peut engager la responsabilité civile, pénale ou disciplinaire de son auteur, sauf s’il est établi qu’il n’a pas agi de bonne foi. Ils ne peuvent pas me condamner pour immixtion dans les affaires de famille pour un signalement d’enfant en danger effectué aux autorités administratives définies par la loi. Ils font encore une erreur de droit et je me demande quand cela cessera car ils me condamnent pour de nouvelles fautes à chaque audience… », déplore la pédopsychiatre qui est une membre active du Réseau de professionnels pour la protection de l’enfance.