France

MSF déploie des équipes pour combler les lacunes de l’Etat à Calais

En 2016, Médecins sans frontières (MSF) mettait fin à sa mission auprès des migrants de Calais. Non que la situation sur place fût réglée, tant s’en faut, mais parce qu’une passation de compétences avait été effectuée avec un dispositif de permanence d’accès aux soins de santé (Pass). Sauf que, sept ans plus tard, l’ONG a constaté que cela n’était plus suffisant face à la détresse physique et psychologique des personnes exilées présentes sur le littoral.

« A l’époque, il s’agissait d’un projet d’urgence, parce qu’il y avait besoin de mettre rapidement des personnes à l’abri. Aujourd’hui, le contexte est tel que les besoins sont toujours là, parce que les politiques n’ont pas changé, voire ont empiré », explique Serena Colagrande, porte-parole de la mission France de MSF. « Les démantèlements systématiques effectués par la police, parfois avec violence, la confiscation des biens personnels, la marginalisation et les entraves à la solidarité ont mené à une précarisation toujours plus forte des personnes exilées et contribuent à détériorer leur état de santé », déclare Pauline Joyau, coordinatrice du projet de MSF à Calais, dans un communiqué. Un constat qui a donc amené l’ONG à redéployer une équipe dans le Calaisis.

« Violences physiques » et « expériences traumatiques »

Outre cette coordinatrice, l’équipe est composée d’une infirmière, d’une psychologue, d’une assistante sociale et de deux médiateurs culturels. Tous se rendent dans les campements, mais aussi les accueils de jour et les maisons d’accueil, notamment pour sensibiliser les migrants « aux questions de santé mentale, identifier les cas les plus vulnérables à travers des activités psychosociales et les orienter vers la Permanence d’accès aux soins ou l’hôpital », détaille l’ONG. Au cours de leurs maraudes, les membres de l’équipe de MSF ont déjà pu constater des pathologies récurrentes, entre autres des problèmes respiratoires liés au froid et au manque de traitement des infections, ou des douleurs traumatologique liées aux tentatives de passages en camion. Sans compter les « violences physiques pendant leur parcours migratoire » et les « expériences traumatiques », comme le naufrage dans la Manche.

MSF le reconnaît, il y a moins de migrants aujourd’hui qu’en 2016, « parce que les passages se font plus facilement », nous explique-t-on. Des passages « faciles », mais pas sûrs pour autant. Entre 1999 et 2023, « plus de 350 personnes ont perdu la vie en France, en Belgique, au Royaume-Uni ou en mer en tentant de rejoindre l’Angleterre », déplore MSF. Des drames que l’ONG impute à la « réduction des voies d’accès sûres et légales pour accéder au Royaume-Uni ».

MSF dénonce aussi les « entraves au secours organisées à l’encontre des associations, ainsi que les pressions faites aux bénévoles ». Autant de raisons qui rendent impossible la détermination d’une date de fin de mission pour l’ONG. « Notre vocation n’est pas de rester à Calais pour toujours, mais on restera le temps qu’il faut, jusqu’à ce qu’un système qui fonctionne soit mis en place avec une prise en charge adaptée à ces personnes qui ont vécu des violences », affirme Serena Colagrande.