FranceHigh-tech

Intelligence artificielle : Elon Musk et des centaines d’experts réclament une pause face aux « risques pour l’humanité »

Ils sonnent l’alarme. Alors que la machine est capable de générer des images photoréalistes, de passer l’examen du barreau américain ou d’entrée en médecine, Elon Musk et des centaines d’experts mondiaux ont signé mercredi un appel à une pause de six mois dans la recherche sur les intelligences artificielles plus puissantes que GPT 4, le modèle d’OpenAI lancé mi-mars, en évoquant « des risques majeurs pour l’humanité ».

Dans cette pétition parue sur le site futureoflife.org, ils réclament un moratoire jusqu’à la mise en place de systèmes de sécurité, dont de nouvelles autorités réglementaires dédiées, la surveillance des systèmes d’IA, des techniques pour aider à distinguer le réel de l’artificiel et des institutions capables de gérer les « perturbations économiques et politiques dramatiques (en particulier pour la démocratie) que l’IA provoquera ».

« Potentiel de manipulation »

La pétition réunit des personnalités qui ont déjà publiquement exprimé leurs craintes envers des IA incontrôlables qui surpasseraient l’être humain, dont Elon Musk, propriétaire de Twitter et fondateur de SpaceX et de Tesla, et Yuval Noah Harari, l’auteur de « Sapiens ».

Également signataire, Yoshua Bengio, pionnier canadien de l’IA, a exprimé ses préoccupations, lors d’une conférence de presse virtuelle à Montréal : « Je ne pense pas que la société est prête à faire face à cette puissance-là, au potentiel de manipulation par exemple des populations qui pourrait mettre en danger les démocraties ».

« Il faut donc prendre le temps de ralentir cette course commerciale qui est en route », a-t-il ajouté, appelant à discuter de ces enjeux au niveau mondial, « comme nous l’avons fait pour l’énergie et les armes nucléaires ».

Les chercheurs sont partagés sur les progrès récents. Certains estiment que GPT-4 montre des bribes de ce qui pourrait mener à une intelligence artificielle « forte », capable d’apprendre comme le font les humains. D’autres, comme le pionnier français Yann Lecun, sont plus réservés.

« La société a besoin de temps pour s’adapter »

Sam Altman, patron d’OpenAI, concepteur de chatGPT, a lui-même reconnu être « un petit peu effrayé » par sa création si elle était utilisée pour de « la désinformation à grande échelle ou des cyberattaques ». « La société a besoin de temps pour s’adapter », avait-il déclaré à ABCNews mi-mars. Mais il n’a pas signé ce moratoire.

« Ces derniers mois ont vu les laboratoires d’IA s’enfermer dans une course incontrôlée pour développer et déployer des cerveaux numériques toujours plus puissants, que personne – pas même leurs créateurs – ne peut comprendre, prédire ou contrôler de manière fiable », estiment-ils.

« Devons-nous laisser les machines inonder nos canaux d’information de propagande et de mensonges ? Devrions-nous automatiser tous les emplois, y compris ceux qui sont gratifiants ? Devons-nous développer des esprits non humains qui pourraient un jour être plus nombreux, plus intelligents, plus obsolètes et nous remplacer ? Devons-nous risquer de perdre le contrôle de notre civilisation ? Ces décisions ne doivent pas être déléguées à des leaders technologiques non élus », concluent-ils.

Les signataires comprennent aussi le cofondateur d’Apple Steve Wozniak, des membres du laboratoire d’IA de Google DeepMind, le patron de Stability AI Emad Mostaque, concurrent d’OpenAI, ainsi que des experts en IA et universitaires américains, ingénieurs cadres de Microsoft, groupe allié de OpenAI.