Belgique

Pourquoi les villes transforment leurs entrées en réduisant la place de la voiture

À Liège comme dans beaucoup d’autres endroits en Belgique, les entrées des villes se transforment. Le cas le plus emblématique est celui de Bruxelles. Il y a quelques années, le viaduc Reyers, où passait l’E40, fut détruit au profit d’un nouvel axe. Bientôt, ce sera au tour de l’entrée nord et de son autoroute A12 de laisser la place à la verdure et à la mobilité douce. Le viaduc Herrmann-Debroux y passera aussi dans les prochaines années. Mais le mouvement s’observe aussi à Charleroi, Huy, Ciney, Bastogne, Tubize… Pourquoi donc les villes transforment leurs entrées et, surtout, pourquoi maintenant ?

Pourquoi le viaduc Herrmann-Debroux ne sera pas démoli en 2027 comme prévu

La fin d’une époque

Coup d’œil dans le rétro. “Dans les années 60, la plupart des villes ont décidé de construire des voies dites pénétrantes. Elles devaient amener les automobilistes jusqu’au milieu des centres-villes. L’idée était de dédoubler les routes existantes afin de faire entrer les voitures le plus loin possible”, expose Yves Hanin, sociologue et urbaniste, directeur du Creat (Centre de recherches et d’études pour l’action territoriale). L’époque était au tout à la voiture.

Mais rapidement, ces axes vont se transformer en couloirs presque infranchissables qui empêchent la circulation entre les quartiers, allant à l’encontre de leur fonction première. “Au XIXe siècle, les boulevards servaient à relier les nouveaux quartiers au centre, ou les nouveaux quartiers entre eux. C’est leur rôle structurant qui, avec l’essor de la voiture, a parfois été oublié”, pointe le sociologue urbaniste.

Ces artères jouent aussi un rôle dans le développement du commerce. Et là aussi, la voiture a changé la donne. “Le boulevard a aussi une fonction de desserte où il doit donner accès à toute une série de bâtiments ou d’éléments à chacun de ses bouts. Or, on a souvent vu que la transformation en couloir à voitures favorisait la multiplication des commerces qui s’étirent tout le long”.

Vecteur de dynamisme

Au sud du pays, Marche-en-Famenne fut l’une des premières villes à lancer le chantier au tournant des années 2010. Jusqu’alors, l’axe d’entrée dans la ville était composé d’une route à quatre bandes et de trois feux de signalisation. Les soucis de circulation y étaient quotidiens et il n’y avait aucune place pour la mobilité douce. La commune a alors décidé de transformer la voirie. Exit les quatre bandes ; il n’y en a désormais que deux et, au milieu, une vaste bande cyclo piétonne parsemée d’arbres. “Avec la mise en place de ce boulevard, la volonté était de réconcilier les quartiers et d’améliorer la mobilité”, explique Nicolas Grégoire (Les Engagés), échevin de la Mobilité. “Nous avons assisté à une requalification urbanistique des zones qui entourent le boulevard. C’est donc un vecteur de renouveau et de dynamisme”, souligne l’élu.

S’il tire un bilan positif, l’échevin observe que tous les problèmes de circulation ne sont pas résolus. “Il y a encore trop de trafic de transit qui y passe. Pourtant, nous avons mis en place un axe de désengorgement, mais il n’est pas encore assez utilisé.

Des îlots de fraîcheur

En réduisant le nombre de bandes de circulation dédiées au trafic automobile, les villes qui optent pour les boulevards urbains entendent réduire le flux des voitures qui entre dans le centre-ville, notamment en délestant le trafic de transit. “La généralisation des boulevards urbains accompagne une certaine idée de transformation de la ville vers un endroit plus agréable à vivre”, pointe Yves Hanin, qui voit là encore deux autres fonctions des boulevards. “Il y a une fonction de séjour, c’est-à-dire un endroit où il est agréable de se balader et de passer du temps. C’est ce qu’on retrouve dans l’aménagement du piétonnier à Bruxelles, mais aussi dans le cas de Marche-en-Famenne. Enfin, la dernière fonction concerne le changement climatique et la multiplication des canicules. Les boulevards doivent revenir des îlots de fraîcheur dans les villes avec de la verdure.