Belgique

Le 14 mars 2016, l’occasion manquée de découvrir les terroristes des attentats de Bruxelles

Le 14 mars 2016, le propriétaire de l’immeuble a effectué une visite impromptue dans cette planque car il avait été alerté par les occupants de l’appartement situé à l’étage du dessous, qui se plaignaient d’infiltrations d’eau venue du plafond. Les terroristes l’ont finalement rassuré et il est reparti.

Ce propriétaire a été entendu comme témoin mardi devant la cour d’assises. Cet entrepreneur avait acheté l’immeuble, comptant 10 appartements répartis sur cinq niveaux identiques en janvier 2016. “C’était un immeuble assez vétuste qui devait être rénové”, a-t-il expliqué, indiquant que, pour lui, qui avait un prêt, il s’agissait de travailler rapidement pour louer très vite les appartements.

Il y avait donc de nombreuses visites. L’appartement – avec une chambre au 5e et dernier étage – a été loué à un homme se présentant comme Miguel Dos Santos. C’était en réalité Ibrahim El Bakraoui, qui se fera exploser à Zaventem. Son candidat locataire lui a présenté une fiche de paie montrant qu’il travaillait pour une firme de transport, avec un salaire correct. Il a indiqué qu’il occuperait l’appartement seul. Seule exigence de ce locataire : une fois qu’il rentrerait, plus question pour le propriétaire de venir encore faire des travaux, même de finition.

Le propriétaire lui a fait confiance, d’autant que, comme lui, il portait un nom à consonance portugaise. Ibrahim El Bakraoui dira que c’est parce que sa mère était portugaise. “Je l’ai vu deux ou trois fois. Son profil était correct, niveau tenue, parler ou situation professionnelle.”

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Une malencontreuse fuite

Le 14 mars 2016, le propriétaire a été alerté par téléphone en début de soirée par l’occupant du rez-de-chaussée, qui est son homme de confiance dans l’immeuble. Ce dernier lui a transmis une plainte des occupants du 4e étage, faisant état d’infiltration d’eau. Le propriétaire a alors tenté de joindre le supposé Dos Santos, qui n’a toutefois pas répondu. Il s’est dès lors rendu sur place. “On toque, on toque, on toque : pas de réponse”. Cela a duré quelques minutes.

Il a sorti la clé de sa poche. “Je glisse la clé dans la serrure et j’entends du bruit à l’intérieur”, a-t-il exposé devant la cour. On lui a ouvert. Après avoir exposé la raison de sa visite, on l’a fait patienter “entre 15 et 30 secondes” avant de lui donner accès à l’appartement.

Le propriétaire a vérifié cuisine et salle de bains, les deux pièces où il y avait une arrivée d’eau. “Cela a duré entre une et deux minutes.” Il n’a rien constaté. L’un des occupants lui a dit que de l’eau s’était répandue sur le sol et que cela devait être l’origine de l’infiltration chez le voisin du dessous.

Il n’a vu ni le salon – où était suspendu un drapeau de l’État islamique – ni la chambre – où étaient stockés le TATP déjà fabriqué et les produits précurseurs. La porte des deux pièces était fermée, sans quoi, a expliqué le propriétaire, il aurait jeté un coup d’œil et, qui sait, peut-être découvert le “pot aux roses”.

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Le lendemain, les terroristes seront à nouveau bousculés. La police investit la planque de la rue du Dries à Forest, d’où Salah Abdeslam et Sofien Ayari parviendront à s’échapper.

L’origine de la fuite sera connue après les attentats. Abrini a expliqué que lors de la confection du TATP, il y a eu un accident. Le mélange a pris feu. Il a fallu l’éteindre. Krayem – qui le nie – et El Bakraoui ont été brûlés au visage.

Aujourd’hui, le propriétaire en a encore des sueurs froides quand il pense à ce qui se serait passé s’il était entré d’initiative avec son double. “Je ne sais pas ce que serait ma vie aujourd’hui, si je serais encore là.”

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