Belgique

Crise de l’accueil : un premier paquet de mesures pour sortir de l’impasse

Concrètement, le gouvernement entend travailler sur deux axes : d’un côté, un renforcement de sa capacité d’accueil – via la création et la libération de milliers de places dans les centres – et de l’autre, une réforme de sa politique d’accueil, basée sur un modèle de migration “contrôlé” et “équitable”.

Tout d’abord, 2 000 places supplémentaires seront créées dans les mois à venir, promet le gouvernement. D’ici la fin du mois d’août, 700 personnes devraient pouvoir être logées à Kampenhout (Brabant flamand), dans des conteneurs financés par l’Union européenne. Un millier de places devraient également voir le jour dans les communes, via les initiatives locales d’accueil (ILA). Une convention entre Fedasil et la Région bruxelloise permettra enfin de créer 300 places supplémentaires dans la capitale dès l’hiver prochain. Si les intentions sont bonnes, dans les faits, de nombreux détails techniques restent à régler. Surtout, les doutes subsistent : Fedasil dénichera-t-il suffisamment de personnel pour assurer la gestion de ces nouveaux centres ? Les bourgmestres vont-ils réellement accepter d’accueillir des demandeurs d’asile sur leur territoire sans plan contraignant de répartition ?

« Situation hallucinante »: des occupants du Palais des droits contraints de retourner à la rue

Une réforme en quatre axes

Cela étant, la secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration est claire : la création de nouvelles places est loin d’être suffisante pour résoudre la crise de l’accueil. Des places supplémentaires doivent être libérées dans les centres existants. Et surtout, la Belgique a besoin d’une véritable réforme de sa politique migratoire. Le premier paquet de mesures présenté jeudi, divisé en quatre volets, ouvre ainsi la voie à des changements plus structurels.

D’abord, l’accueil sera à l’avenir uniquement réservé à ceux “à qui il est destiné”. Ainsi, seules les personnes faisant l’objet d’une procédure d’asile pourront demander à être accueillies. Les personnes qui ont reçu une décision négative devront quitter le réseau dans un délai de 30 jours, sans exception. Les déboutés qui introduisent une demande de régularisation à l’issue de leur refus ne seront plus pris en charge par Fedasil, ce qui permettra de réduire considérablement la durée de l’accueil, et à terme, de libérer environ un millier de places.

La politique de retour sera également renforcée. “Nous ne nous contenterons pas de donner aux gens un papier leur disant de quitter le pays, mais nous leur proposerons un solide accompagnement au retour”, insiste Nicole de Moor. Une obligation de coopérer sera introduite et, en cas de refus, une approche “forcée” du retour sera plus rapidement mise en œuvre.

Le gouvernement entend également lutter contre les abus, notamment en limitant le regroupement familial avec un enfant belge uniquement pour les parents qui participent activement aux soins quotidiens de cet enfant. “Cette restriction permettra de lutter contre la pratique des ‘bébés-papiers‘”, insiste le gouvernement.

Enfin, certains assouplissements seront prévus pour les personnes vulnérables. Les parents de réfugiés mineurs pourront obtenir un droit de séjour et les apatrides seront davantage protégés. Aussi, les mineurs ne pourront plus être placés dans des centres de détention.

Le fiasco du Palais des droits, un nouveau revers pour Nicole de Moor

Des délais “stupéfiants”

Si l’accord intervenu ce jeudi a été salué par l’ensemble de la Vivaldi – chaque parti y trouvant son compte d’une manière ou d’une autre, il laisse dubitatives les associations de terrain. “J’ai toutes les craintes que ce ne soient que des effets d’annonce, qui ne seront pas vérifiés dans les faits”, s’inquiète Sotieta Ngo, directrice du Ciré (Coordinations et initiatives pour réfugiés et étrangers). Pour la directrice de l’ASBL, les délais pour créer les places supplémentaires sont “stupéfiants” face à la crise actuelle : “Sur la liste d’attente de Fedasil, il y a plus de 1500 personnes à ce jour. Sans compter celles qui arrivent quotidiennement. Il aurait fallu des mesures plus ambitieuses, qui ont un effet concret tout de suite”, tonne Sotieta Ngo, qui craint la multiplication de nouveaux squats face au manque de solutions d’urgence.

Si elle salue l’interdiction de l’enfermement des enfants, la directrice du Ciré s’inquiète de la direction prise par le gouvernement avec ces nouvelles mesures. “C’est regrettable de voir des termes comme ‘lutte contre les abus’ être utilisés à toutes les sauces, alors que pour le moment, les abus sont surtout le fait des autorités qui ne respectent pas le droit à l’accueil. La pilule est difficile à avaler au vu des 18 mois qui viennent de s’écouler, où on a assisté à une démultiplication des condamnations de l’État belge en justice.