Belgique

”Certains jeunes ont importé à Zaventem une forme de violence qu’on ne connaissait pas vraiment par ici”

Plusieurs jeunes se sont en effet violemment disputés vendredi aux alentours de 16 heures. Une bagarre qui aurait débuté dans l’un des établissements scolaires du quartier de la gare de Zaventem pour des raisons encore inconnues. L’hypothèse la plus probable serait une histoire de cœur. Les jeunes ont commencé à s’invectiver à l’école, avant de se retrouver sur la Karel Quitmannplein, à l’entrée de la gare, puis de poursuivre leurs échanges de coups sur l’un des quais. Trois personnes se sont retrouvées sur les rails.

Saad E.B, 22 ans et originaire d’Etterbeek, n’a pas réussi à quitter la voie ferrée alors qu’un train approchait à toute vitesse, le percutant de plein fouet. Il est mort sur le coup. Un autre jeune bruxellois, âgé de 16 ans, est lui gravement blessé et aurait perdu une jambe.

Quatre individus ont été interpellés peu après les faits. L’un d’entre eux a pu repartir libre après avoir été entendu, les trois autres ont comparu dimanche devant un juge d’instruction. Ils sont soupçonnés d’homicide involontaire, de coups et blessures volontaires sur mineur avec préméditation et de mutilation grave. Un Anderlechtois de 19 ans a été placé sous bracelet électronique par un juge d’instruction, tandis que les deux autres suspects, un homme de 22 ans vivant à Berchem-Saint-Agathe et un Etterbeekois de 20 ans, ont été libérés sous conditions.

« Je ne dis pas que Zaventem, c’est le paradis sur terre. Mais ce qui est sûr, c’est que ce sont des choses qu’on entend souvent de la part de jeunes qui ne viennent pas d’ici. Après ce qui s’est passé, je n’ai pas laissé mes enfants aller à l’école aujourd’hui. J’ai trop peur ».

Une violence importée

”Dans le quartier, c’est l’incompréhension, poursuit Ludo. Il y avait énormément de monde, surtout des parents avec leurs jeunes enfants. Je me dis qu’ils ont peut-être vu des horreurs, ou qu’ils auraient pu être bousculés et se retrouver malgré eux dans un tel chaos, c’est choquant. Et puis, c’est terrible de se dire que ces jeunes avaient toute la vie devant eux, mais qu’aujourd’hui, un est mort et qu’un autre a perdu une jambe.”

Sur la Karel Quitmannplein, là où l’altercation entre les jeunes s’est envenimée, Warda s’arrête pour saluer les nombreuses patrouilles de police circulant dans le quartier. Avant de poursuivre son chemin, en tenant très fort par la main ses deux ados. “Mama, on n’est pas des bébés, lâche-nous”, hurle l’un des jeunes.

Et Warda de nous raconter, sans jamais lâcher ses enfants : “Je n’étais pas présente, mais il y avait beaucoup de monde ici, et avec les réseaux sociaux, on était informés presque en temps réel, entame-t-elle. En tant que maman, mon premier réflexe a été de penser aux parents concernés par ce drame. Parce que, vous savez, on aura beau leur donner la plus belle des éducations, les jeunes font quand même ce qu’ils veulent et peuvent se retrouvent impliqués dans ce genre de bazar. Même en faisant tout pour les éloigner des mauvaises fréquentations, parfois, ça se mélange dans la rue, et on peut tomber sur des vilains garçons”.

Car selon cette jeune maman native de Zaventem, il n’est pas rare que des jeunes venus d’ailleurs se retrouvent dans le quartier pour en découdre. Mais jamais au point que mort s’en suive. “Ce qui est très fréquent, c’est la violence verbale. Je ne dis pas que Zaventem, c’est le paradis sur terre. Mais ce qui est sûr, c’est que ce sont des choses qu’on entend souvent de la part de jeunes qui ne viennent pas d’ici. Après ce qui s’est passé, je n’ai pas laissé mes enfants aller à l’école aujourd’hui. J’ai trop peur”.

« À Anderlecht ou à Schaerbeek, ils savent comment gérer ce genre de faits de violence, à Zaventem, c’est moins le cas ».

Moins de monde dans les écoles ce lundi

Devant l’un des trois établissements scolaires où était scolarisée une des personnes concernées par la rixe mortelle, de nombreux parents et grands-parents viennent déposer ou récupérer leurs enfants. “Cela peut paraître stupide de venir chercher mes jeunes qui, dans les faits, sont bien plus costauds que moi. Mais c’est un réflexe de parent, pour nous rassurer et rassurer nos proches”, explique Jacques.

Tout comme Warda, il va saluer les policiers et les remercier pour leur présence. “Peur ? Je n’ai pas peur. Par contre, je reste vigilant, d’autant que mes petits-enfants sont dans la même école. Ce sont des établissements scolaires réputés. Forcément, cela attire des jeunes de tout horizon, et c’est très bien. Mais cela importe aussi des phénomènes qu’on n’a pas l’habitude de vivre ici. En fait, certains jeunes ont importé, à Zaventem, une forme de violence qu’on ne connaissait pas vraiment par ici. À Anderlecht ou à Schaerbeek, ils savent comment gérer ce genre de faits de violence. À Zaventem, c’est moins le cas”.

À la sortie de l’un des établissements, David Nijs, un des directeurs, veut justement tenir un discours plus apaisant à l’égard des parents et des jeunes. “Tout le monde est préoccupé, que ce soient les parents ou les élèves. Il y a moins de personnes présentes aujourd’hui en raison des préoccupations liées à cette triste affaire. Nous sommes là et nous faisons de notre mieux pour rassurer tout le monde.”