Belgique

“Beaucoup d’étudiants doutent de leurs choix d’études, je tiens à leur dire chapeau!”

“On sent une fragilité plus grande chez certains étudiants dont les choix d’orientation ont été faits un peu à la hâte, sans prendre toutes les informations, estime Philippe Catoire, conseiller d’orientation au CIO (Centre d’information et d’orientation de l’UCLouvain). Ces étudiants s’interrogent sur la suite de leurs études, doutent. Nous avons beaucoup de demandes de réorientation.”

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Les étudiants qui arrivent chez vous s’inquiètent-ils des nouvelles règles?

Ce n’est pas leur première question. Sentant qu’ils ne sont pas (tout-à-fait) au niveau, ils sont plutôt dans l’urgence. Dois-je me réorienter? Vers quoi? Au fil de la discussion, on sent qu’ils sont conscients des changements de règles, que le message a bien circulé, mais qu’ils ne savent pas toujours très bien dans quelle mesure ils seront eux-mêmes touchés. A nous de sensibiliser les étudiants qui ne le sont pas encore ou pas suffisamment.

Comment faites-vous pour les aider?

Chaque parcours est différent. Il faut bien décortiquer chaque situation et envisager toutes les hypothèses. Cette année sera-t-elle réussie ou non? Quels scénarios envisager pour la suivante? On fait plusieurs simulations. Tout dépend de la nature et de l’importance des problèmes… Un entretien dure environ 1h15 et chaque jeune peut revenir deux ou trois fois. Plusieurs dispositifs existent aussi pour travailler en groupe.

Quels sont les principaux soucis?

Quelquefois, c’est la méthode de travail qui n’est pas au point. D’autres fois, on constate un manque d’engagement, ou des manquements au niveau des prérequis. Surtout pour les étudiants dont la fin des études secondaires a été bouleversée par la crise sanitaire. Malheureusement, on n’a pas toujours détecté rapidement ce qui ne va pas, surtout quand les auditoires comptent plusieurs centaines d’étudiants… Quand les résultats sont vraiment mauvais et qu’aucun progrès n’est constaté malgré les aides à la réussite (dont la plupart sont facultatives et n’atteignent pas toujours ceux qui en ont le plus besoin), on examine les alternatives.

Par exemple?

Certaines professions et, a fortiori, les études qui y mènent, sont méconnues. Prenez les soins de santé. Tout le monde se dirige vers les mêmes filières, alors qu’il existe d’autres formations assez proches avec des prérequis parfois moins élevés. Devenir éducateur spécialisé en activités socio-sportives est, par exemple, une bonne alternative à l’éducation physique ou à la kiné. Je pense aussi au technologue en imagerie médicale, assez ignoré.

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Y a-t-il des pics de découragement à certaines périodes de l’année?

La remise en question intervient souvent dans la foulée des examens de janvier. En cas d’échecs, il y a souvent un temps de latence. Puis les démarches commencent fin mars, début avril. Certains étudiants nous arrivent même en ce moment. Ceux qui se demandent si ça vaut vraiment la peine de passer leurs examens, par exemple…

L’envie d’être en vacances dès maintenant, peut-être?

Pas question de cela, non. Il y a de toute façon un travail à faire pour combler ses lacunes ou construire un plan B, en cas de réorientation. Vérifier si une nouvelle voie tient vraiment la route, effectuer une série de démarches, trouver des cours le cas échéant…

Quel regard portez-vous sur les jeunes que vous accompagnez?

Je veux vraiment dire chapeau à ces étudiants, déjà bien malmenés par le Covid. Vous savez, ce n’est pas simple de ravaler sa fierté et d’aller dire à un adulte qu’on n’en sort pas. Faire face à la situation demande beaucoup de courage. Mais c’est ainsi qu’on s’en sort. En étant acteur de son avenir, on sera récompensé.