France

Réfugiés : Des associations dénoncent des recours abusifs aux centres de rétention administrative

En durcissant le ton contre l’immigration, le ministère de l’Intérieur a provoqué une banalisation de l’enfermement en centres de rétention administrative (CRA). C’est ce que dénoncent cinq associations, dont La Cimade ou encore France terre d’asile, dans leur rapport annuel paru mercredi.

Le rapport annuel « confirme un recours banalisé à la rétention, de manière trop souvent abusive et parfois dans des conditions indignes » au sein des 25 centres de rétention que compte la France (dont quatre en outre-Mer). « Ces dérives ont été particulièrement importantes cette année du fait des directives claires du ministère de l’Intérieur de privilégier l’enfermement dans les CRA des étrangers dont le comportement constituerait un « trouble à l’ordre public » », souligne le rapport, une politique qui viendrait « occulter » la situation personnelle de la personne concernée.

De nombreux enfants enfermés à Mayotte

De plus, les associations notent l’augmentation de 76 à 94 enfants enfermés dans ces centres dans l’Hexagone, dont la moitié a moins de 12 ans. « L’enfermement a des conséquences dramatiques sur la santé mentale des enfants : repli sur soi, les insomnies, le refus de s’alimenter, et le stress post-traumatique », jugent-elles encore, rapporte France Info. C’est en outre-mer, et particulièrement à Mayotte, qu’ils sont le plus nombreux avec 2.905 enfants ont été enfermés en CRA ou LRA (locaux de rétention administrative), soit 30 fois plus que dans l’Hexagone.

Depuis les instructions d’août et novembre 2022 de Gérald Darmanin, les CRA recensent davantage de personnes qui auraient pu se prévaloir d’un droit de séjour sur le territoire français, enfermées pour des motifs parfois « dérisoires », tels que des regards « suspicieux » autour de soi ou un crachat sur le trottoir, listent les associations. « Pour à peu près tout et n’importe quoi, on va désormais justifier un placement en rétention pour une prétendue menace à l’ordre public », une notion qui reste floue, commente auprès de l’AFP Dalia Frantz, responsable de la rétention à La Cimade. Et de préciser que cette tendance « se poursuit » depuis début 2023. Les associations dénoncent également une politique qui nourrit des « amalgames abusifs » entre immigration et délinquance.

Une durée multipliée par deux

En 2022, 43.565 sans-papiers ont été placés en rétention dans l’attente de leur expulsion. Un chiffre toujours inférieur à ceux enregistrés avant la pandémie en 2019 (53.273). Par rapport à 2021, le nombre d’étrangers en CRA reste stable à Mayotte (26.020) mais augmente de 8,3 % dans l’Hexagone (15.922). « Disproportionné », ce recours à l’enfermement est jugé « inutile » par les défenseurs des migrants : sur l’ensemble des immigrés en situation irrégulière enfermés l’an passé, la moitié d’entre eux a été libérée, notamment du fait d’irrégularités de procédure.

Autre point d’alerte : la durée moyenne de rétention est désormais de 23 jours en France métropolitaine, les étrangers ne pouvant être détenus plus de trois mois. Elle a quasiment été multipliée par deux depuis 2017 alors que les expulsions se font encore lors des premiers jours de l’enfermement, relèvent les associations.