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Conflit au Soudan : Trêve violée, combats et centaines de morts… Le point sur 20 jours de guerre civile

Déjà vingt jours que les combats font rage dans Khartoum. L’armée et les paramilitaires se disputent le pouvoir au Soudan et les civils en subissent les violentes conséquences. Une guerre qui a pris de court la communauté internationale. Au lieu de négociations politiques prévues le 15 avril, les 45 millions de Soudanais se sont réveillés au bruit de l’artillerie et des raids aériens. « Nous pouvons dire que nous n’avons pas réussi à empêcher » la guerre qui a pris l’ONU « par surprise », a reconnu mercredi son secrétaire général Antonio Guterres. Désormais, les trêves annoncées ne sont pas respectées et les personnes tuées se comptent par centaines. Le point sur les derniers événements.

Une trêve à peine commencée, déjà entravée

Après des semaines de combats, le Soudan du Sud, médiateur historique, a annoncé une trêve « du 4 au 11 mai. » Mais dès son entrée en vigueur, l’armée et les FSR (Forces de soutien rapide) se sont accusés de la violer. « Des affrontements avec toutes sortes d’armes et des explosions » secouent Khartoum, rapportent en effet des habitants à l’AFP.

Le chef d’un des principaux groupes rebelles du Darfour, Abdel Wahid Nour, a appelé les deux généraux en guerre à cesser les combats.  « C’est une catastrophe, affirme-t-il. Il ne peut y avoir de vainqueur dans cette guerre. » « Nous appelons les deux camps à respecter le cessez-le-feu », ajoute-t-il alors que de multiples trêves ont été violées dès leur entrée en vigueur dans ce pays d’Afrique orientale, l’un des plus pauvres au monde.

Les tentatives diplomatiques se poursuivent

Alors que les canaux diplomatiques se multiplient en Afrique et au Moyen-Orient, l’armée a plaidé pour « des solutions africaines aux problèmes du continent. » Elle a également salué les médiations américano-saoudiennes, après une tournée cette semaine de son émissaire à Riyad puis au Caire et à la Ligue arabe.

Les ministres arabes des Affaires étrangères se réuniront dimanche autour du « dossier soudanais », dans lequel ils soutiennent des camps différents, a indiqué un haut diplomate à l’AFP. Le camp du général Burhane s’est engagé à « nommer un émissaire pour négocier une trêve » avec le camp rival, sous l’égide « des présidents sud-soudanais, kényan et djiboutien », dans un pays qui doit encore être déterminé.

Des centaines de millions de dollars pour aider la population

Alors que l’exode des Soudanais se poursuit, des étrangers continuent d’être évacués par centaines, principalement via Port-Soudan, sur la mer Rouge. Les combats ont déplacé plus de 335.000 personnes et poussé 115.000 autres à l’exil, selon l’ONU, qui s’attend à huit fois plus de réfugiés. A la frontière égyptienne dans le nord, « plus de 50.000 personnes, dont 47.000 Soudanais [l’] avaient traversé le 3 mai », selon l’ONU qui a été autorisée jeudi à se déployer côté égyptien.

L’ONU a estimé avoir ainsi besoin de 445 millions de dollars pour aider les 860.000 personnes qui pourraient fuir d’ici octobre les combats. Cet appel de fonds a été présenté dans la journée aux pays donateurs par le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), a-t-il indiqué dans un communiqué, ajoutant que l’Egypte et le Soudan du Sud devraient enregistrer le plus grand nombre d’arrivées.

Ce chiffre de 860.000 personnes est une projection préliminaire. Sur ce total, il y aurait 580.000 Soudanais, 235.000 réfugiés précédemment accueillis par le Soudan décidant de revenir dans leur pays d’origine, et 45.000 ressortissants d’autres pays.

Les morts s’accumulent

Les plus de cinq millions d’habitants de la capitale ne vivent plus qu’au rythme des bombardements, terrés pour éviter les balles perdues dans des maisons sans eau ni électricité, avec de moins en moins d’argent et de nourriture, le tout sous une chaleur écrasante. « A chaque minute de guerre de plus, des gens meurent ou sont jetés dans les rues, la société se désagrège et l’Etat s’affaiblit et se décompose un peu plus », a déploré Khalid Omar Youssef, un ancien ministre civil limogé lors du putsch. Le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Volker Türk, décrit le chaos à Khartoum : « un raid de l’armée de l’air sur un hôpital », les FSR qui « lancent des attaques dans des zones urbaines densément peuplées. »

Depuis le 15 avril, au moins 550 personnes ont été tuées, environ 700 morts, selon le projet ACLED, principalement à Khartoum et au Darfour, dans l’ouest frontalier du Tchad. Face aux plus de 5.000 blessés, selon les chiffres officiels, les hôpitaux ne peuvent suivre : moins d’un sur cinq est encore en fonctionnement à Khartoum et quasiment aucun au Darfour.