Belgique

Un employé de l’État faisait du télétravail en vacances : repéré par un collègue puis viré

Le collègue l’a dénoncé. Et le fonctionnaire a dû prendre un avocat pour tenter de conserver son emploi, l’autorité voulant le licencier en s’appuyant sur le règlement qui stipule que le télétravail s’effectue depuis le domicile. Autrement dit : il n’autorise pas de télétravailler dans l’avion qui vous amène sur un lieu de villégiature…

Domicile

Cet agent du service public était enclin à considérer qu’en fin de compte, le domicile n’a qu’une importance relative, l’essentiel étant moins le lieu physique où il s’effectue que l’objectif de fournir un travail de qualité.

Le cas soulevé est le suivant. Engagé depuis trois ans en tant qu’analyste, l’agent était autorisé à travailler à distance, moyennant certaines conditions dont celles d’être joignable et d’effectuer le travail depuis le domicile.

Il y avait, cette semaine-là, un dossier particulièrement complexe à boucler pour le vendredi. Le fonctionnaire s’est mis à la tâche. Il relate avoir travaillé le mardi bien au-delà des heures de bureau habituelles, et terminé la soirée, un peu avant minuit, en encodant dans le système une demande de télétravail pour le lendemain, le jeudi et le vendredi.

Le mercredi, l’employé se trouvait à 9 h du matin à Brussels Airport, afin de prendre un vol pour Porto. Son chef de service ne l’aurait pas su si, par un hasard incroyable, un collègue n’avait pris le même vol pour Porto. Et le collègue l’a dénoncé. Une procédure disciplinaire a été ouverte, laquelle aboutissait au licenciement pour faute grave.

Arguments

L’administration s’est montrée intraitable. Pour elle, l’employé ne se trouvait pas chez lui le mercredi matin, mais à l’aéroport, puis en l’air entre Bruxelles et le Portugal, puis dans son lieu de villégiature du côté de Porto.

L’employé répondait que le déplacement ne l’a pas empêché de travailler. L’Airbus n’avait pas décollé qu’il sortait son ordi, se plongeait dans les dossiers et se mettait à la tâche.

En plus, il avait un témoin. Il retournait en sa faveur le témoignage du collègue : « Puisqu’il se trouvait sur le même vol, ce collègue a pu constater que j’ai travaillé dans l’avion sur mon ordinateur portable. J’ai travaillé hors réseau sans être dérangé, donc plus efficacement que si j’avais télétravaillé depuis mon domicile. J’ai bien avancé pendant le vol de même que les deux jours suivants à Porto. J’ai achevé de traiter les dossiers dans les délais ».

Lien de confiance

La direction campait sur le principe qu’elle avait autorisé le télétravail à la condition d’être contactable entre 9 h et midi et l’après-midi entre 14 et 16 heures.

L’employé répondait qu’il était vérifiable qu’il avait décroché et répondu à chaque fois que le service avait cherché à le contacter. « Et je rappelle que le mardi soir, j’avais travaillé jusqu’à près de minuit, bien au-delà des heures habituelles. Non seulement avoir télétravaillé dans l’avion et depuis n’a eu aucune incidence, mais j’ai travaillé dans de meilleures conditions qu’à la maison, et j’ai fourni dans les délais fixés un travail de meilleure qualité. Le vendredi soir, j’avais terminé. Il faut que je vous dise que ce n’est la première fois non plus que je ne télétravaille pas depuis mon domicile. J’avais déjà procédé ainsi depuis notre maison familiale en Bretagne ».

Dans la lettre de licenciement, l’administration mentionne que l’agent a adopté un comportement « malhonnête ». Il a, selon elle, « transgressé les règles applicables en matière de congé et de télétravail » et de cette façon, « trompé sa hiérarchie ».

L’employé estimait qu’une sanction devait être prononcée, celle du licenciement était « disproportionnée par rapport à la gravité des faits ».

Disproportionné

Son recours est rejeté. Le Conseil d’État a estimé que l’employeur, l’administration, a parfaitement pu considérer que l’attitude réfléchie adoptée par l’employé rompait définitivement le lien de confiance. Pour rappel, comme dans le privé où le télétravailleur doit faire sa demande de télétravail occasionnel à son employeur au préalable (loi du 5 mars 2017), le télétravail est possible dans la fonction publique. Il s’effectue à domicile. Si ce n’est pas le cas, le chef fonctionnel doit en être informé.