Belgique

Porté disparu depuis 2017, ce Namurois est retrouvé à… Huy : « Les policiers me regardaient bizarrement »

Ce qui justifie cet avis est à rechercher dans son passé namurois. Le tout récent Hutois vivait autrefois à Namur et y travaillait. « Je travaillais pour le CPAS de Namur dans une maison de repos. Mais je ne m’entendais pas avec mes collègues, ni d’ailleurs avec mes voisins. » Et un jour, il n’a pas hésité à prendre son sac à dos et à tout quitter, sans prévenir personne… Harold Laurens voulait une autre vie, il a tiré un trait sur la sienne. Sauf qu’à la même époque, ou presque, la police découvrait le corps sans vie d’un homme dans la Meuse. Qui y avait séjourné tellement longtemps que le corps n’était pas identifiable. « Il y a eu une reconstitution faciale, on l’a comparée à ma photo. Nos visages se ressemblaient à 99%. » Et le Hutois d’ajouter: « c’est troublant car moi, j’étais toujours vivant ». Mais il était en France où l’homme a bourlingué pendant plusieurs années, parcourant l’Hexagone en long et en large. Dormant sous tente et vivant de son art, le dessin. « Je n’avais pas de téléphone, pas d’adresse, je survivais grâce à mes dessins. Je dessinais des bâtiments médiévaux car j’aime le Moyen Âge, des portraits aussi. J’ai fait ça pendant des années. » Harold Laurens se contentait de cette vie, sans avoir l’envie de demander l’aide sociale en France ou encore de revenir en Belgique. Et sa famille ? Ses contacts étaient quasi inexistants avant sa disparition déjà.

Du sud, l’homme est remonté en Bretagne puis en Normandie où il est resté quelque temps. « Je continuais ma vie là-bas. » Sans savoir qu’il faisait l’objet d’un avis de disparition européen. Sa « vie d’errance » l’a emmené un peu partout, lui a fait vivre la crise des gilets jaunes, le confinement « où j’étais confiné dehors »… Il y a un an et demi, Harold Laurens a décidé de revenir en Belgique. « Je suis revenu à Namur, j’ai continué à vivre de mes dessins » avant de quitter cette ville « trop violente » pour Huy. « J’y ai rencontré des gens, notamment au Vieux Huy où on m’a hébergé. » Et comme il ne voulait clairement plus repartir en France, il a décidé de régulariser sa situation. « En 2021, j’avais été radié, j’étais toujours dans le monde des vivants mais je n’avais plus donné de nouvelles. J’ai donc été radié de la commune. » Il n’avait plus de carte d’identité valable, il devait en refaire une. Il a aussi introduit une demande d’aide au CPAS de Huy. Et comme il a rapidement retrouvé un toit où se loger, il a été contacté par son agent de quartier. « On n’arrivait pas à se trouver, je l’ai contacté, il m’a dit de venir un plus vite au commissariat car un dossier me concernait… » Le fameux dossier de disparition. Aujourd’hui, Harold Laurens le reconnaît: tout ça lui laisse « une drôle d’impression ». Surtout le fait que le cadavre, retrouvé en Meuse puis qui a été inhumé, ait pu faire croire que c’était lui. À 57 ans, Harold Laurens se sent désormais bien à Huy, avec l’envie d’y déposer ses valises « Il est peut-être temps que je me pose. Le corps commence à ne plus suivre. »

« Depuis Julie et Mélissa, il y a des directives »

Un adulte ne peut-il pas disparaître du jour au lendemain, sans donner signe de vie ? « Si, c’est possible », explique le commissaire divisionnaire Jean-Marie Dradin, chef de corps de la zone de police de Huy. Si ce n’est que depuis l’affaire Julie et Mélissa, des directives de la police établissent toute une série de critères à partir desquelles une disparition peut être jugée inquiétante ou pas. Et lorsque cette disparition est jugée inquiétante, alors la machine se met en branle, une enquête policière est lancée. Car pour le même prix, c’est une disparition voulue ou bien un assassinat.

Et ici ? Il y avait des éléments « assez interpellants ». Le fait, notamment que Harold Laurens n’avait pas prévenu son employeur, qu’on n’a plus de nouvelles de lui du jour au lendemain. Et lorsque le néo-Hutois a fait sa demande de domicile à Huy, la procédure classique a été enclenchée. « L’inspecteur de quartier a vérifié que la personne n’était pas signalée à retrouver ou recherchée. » Qu’elle ne devait pas être entendue dans l’un ou l’autre dossier. L’avis de recherche est alors réapparu.

Clairement, un tel avis de disparition avec une personne qui réapparaît après autant d’années, « ce n’est pas courant. De mémoire, je n’ai jamais connu pareille situation à Huy. »