France

Mayotte : Les autorités préparent l’évacuation du « Talus 2 », un bidonville à la tôle bleue et grise

Opération destruction. A l’entrée du bidonville de Majicavo, au nord de l’île de Mayotte, l’un de ceux que les autorités françaises veulent voir rapidement évacués puis démolis, un groupe se forme autour d’une affichette au drapeau tricolore, placardée par des agents municipaux.

Le texte de la feuille A4 annonce une interdiction de circulation mardi « de 5h30 à 17h30 », laissant planer un possible arrêté préfectoral de destruction pour ce jour-là : un « décasage », comme on dit à Mayotte pour parler de l’évacuation et de la destruction des « bangas », ces « favelas » locales. Ici, on l’a rebaptisé « Talus 2 ». Un enchevêtrement de tôle bleue et grise. Chaque porte en métal porte un numéro d’identification, peint à la peinture rose par les services sociaux il y a un mois.

Derrière celle marquée « 126 », la vie de la famille Soufou tient en une dizaine de valises à roulettes et cabas pleins à craquer. « On prépare les bagages pour partir, les vêtements, les draps, toutes les affaires mais on n’a pas fini », explique Zenabou Soufou, 48 ans et sept enfants, tous Français grâce à leur père mahorais né sur l’île.

Plus de 2.000 forces de l’ordre et agents administratifs mobilisés

Sur le lit, les peluches licornes des trois filles n’ont pas encore été empaquetées. La famille n’a aucune idée d’où elle ira, assurant ne s’être vue proposer aucune solution de relogement. « On n’a pas refusé de quitter là (le bidonville, ndlr), mais on veut une maison digne pour que des enfants restent tranquilles à la maison. Mais si on nous détruit les maisons, on va aller où avec les enfants ? », s’interroge la mère de famille.

L’absence de relogement est souvent invoquée dans le quartier. « C’est faux, il y a une proposition faite à chacune de ces familles, qui l’acceptent ou non. C’est de la pure mauvaise foi », fait valoir un fonctionnaire proche du dossier, sur l’île.

Les Soufou sont inexpulsables du territoire donc, mais pas de leur maison. Ils sont aussi l’illustration du casse-tête social et administratif que représente, au cas pas cas, cette opération d’envergure décidée à Paris.

Dans le 101e département français, s’amorce une vaste opération parfois baptisée « Wuambushu » ( « reprise » en mahorais) contre la délinquance et contre l’immigration illégale. Les autorités entendent procéder à des expulsions d’étrangers en situation irrégulière et au « décasage » de quartiers insalubres, souvent squattés. Plus de 2.000 forces de l’ordre et agents de l’administration sont mobilisés.