Belgique

“Au départ, je ne me sentais pas légitime de venir témoigner”: pourquoi Marie a changé d’avis au procès des attentats de Bruxelles

Le 22 mars 2016, Marie quitte très tôt Liège en train, avec sa fille cadette. Elle entend parler des attentats à Zaventem, mais dépose malgré tout sa fille à la crèche à Auderghem. Elle monte dans la troisième rame du métro pour aller au travail, “les yeux rivés à mon téléphone” et pleine d’appréhension.

Une fois passé Schumann, qu’elle considère comme un endroit à risque en raison de la présence des institutions européennes, elle se sent quelque peu soulagée. Arrive alors Maelbeek. Le terroriste se fait exploser dans la deuxième rame. “Quand on redémarre, la voiture s’arrête net. Il y a un gros flash lumineux.” Elle est à terre, “terrorisée”. “J’avais très peur d’une deuxième bombe. Je me suis cachée.”

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À pied, en direction de Liège

Elle entend des coups, qu’elle assimile à des tirs, pensant aux attentats de Paris. Ce sont en fait des coups de personnes coincées dans la rame qui tentent de faire sauter une fenêtre. Marie sort de la station. Malgré ses vêtements déchirés, elle quitte les lieux à pied “en direction de Liège”. On l’accueille dans un commerce de kebab. C’est là que son compagnon vient la rechercher.

Après avoir repris sa fille, elle rentre à Liège. Elle va à l’hôpital en raison de problèmes respiratoires Elle y retournera deux jours plus tard car la fumée de l’explosion a froissé ses cordes focales. Elle reprend rapidement le travail.

Cinq ans plus tard, fin 2021, c’est le contrecoup. Elle a des douleurs dans le dos, avec des élancements dans la jambe. L’IRM ne révèle rien. Cela empire. Elle a des insomnies. “Quand je me reposais, mes muscles tressautaient”. Elle va voir un psychologue. Elle fait des cauchemars liés aux attentats.

”Je ne veux pas faire un raccourci mais cela m’est apparu évident qu’il y avait un lien. Ce qui reste, c’est la tension, une vigilance qui m’accompagne au quotidien même si elle ne m’empêche pas de fonctionner”, dit-elle.

”Je me sens chanceuse. Mais, quelque part, en recommençant à travailler directement, c’est comme si je ne m’étais presque pas autorisée à vivre mes émotions”, poursuit-elle.

”C’est pour ça que je suis là aujourd’hui, pour pouvoir vous raconter tout ça, vous le déposer et repartir un peu plus légère. Ce n’est pas une démarche agréable mais c’est…”, s’interrompt-elle. “Libératoire”, complète alors la présidente de la cour, Laurence Massart. “Je l’espère”, répond Marie.

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