Suisse

«C’est une honte que des retraités suisses ne parviennent pas à se payer un café»

Faut-il verser une rente supplémentaire de l’assurance vieillesse aux Suisses ou les faire travailler un an de plus? Les deux invités de notre débat filmé Let’s Talk ont débattu de l’avenir des retraites, au cœur des votations fédérales du 3 mars.

Ce contenu a été publié le 06 février 2024 – 14:58




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La retraite à 66 ans divise

Pierre-Yves Maillard et Marco Taddei sont tout aussi irréconciliables sur la seconde initiative soumise à votation le 3 mars. Le texte, lancé par les Jeunes libéraux-radicaux, prévoit de relever l’âge de la retraite à 66 ans jusqu’en 2033, puis de le lier à l’espérance de vie.

«L’âge de la retraite fixe ne doit plus être un totem. Si on a l’envie et la santé, on peut travailler au-delà de 65 ans», estime Marco Taddei. La hausse progressive de l’âge de la retraite est une mesure inéluctable pour faire face à l’accroissement de l’espérance de vie et à la pénurie de main-d’œuvre, avance le représentant de l’UPS. «2033, ce n’est pas demain, on a le temps de se préparer à cette réforme», ajoute-t-il.

«Le vrai but de cette initiative est de baisser massivement les rentes, puisque l’âge de référence qui donne droit à une rente pleine est repoussé. Sous prétexte de vouloir stabiliser le système, la droite tente de démolir l’un des plus beaux édifices que la Suisse ait créés et qui repose sur la solidarité entre générations», dénonce de son côté Pierre-Yves Maillard.

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37% des actifs travaillent au-delà de 65 ans

Le président de l’USS estime par ailleurs que la hausse de l’âge de la retraite n’aura que peu d’impact sur l’intégration des seniors sur le marché du travail: «Quand on a plus de 55 ans, postuler pour une place de travail, c’est la croix et la bannière. Ces personnes sont souvent forcées de partir à la retraite avant, parce qu’elles n’en peuvent plus ou n’ont pas d’autres solutions».

Pierre Triolo en a fait l’expérience. Ce Suisse expatrié en République tchèque s’est retrouvé au chômage deux ans avant la retraite et n’a pas retrouvé de travail. «Comme j’étais en fin de droit, je suis parti à l’étranger pour ne pas devoir recourir aux prestations complémentaires», témoigne-t-il.

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Marco Taddei reconnaît que les personnes de plus de 50 ans ont davantage de difficultés à retrouver un emploi lorsqu’ils se retrouvent au chômage. «Mais il faut tordre le cou à l’idée qu’à partir de cet âge, il y a un problème sur le marché du travail. Le taux de chômage dans cette catégorie d’âge est de 2,1% et plus d’un tiers des actifs continuent à travailler au-delà de 65 ans», avance-t-il.

Des chiffres qui ne convainquent pas Pierre-Yves Maillard: «Vous ne trouverez l’exemple de Monsieur Triolo dans aucune statistique. Au-delà de 60 ans, beaucoup de personnes ne supportent plus de demander le chômage ou d’autres prestations sociales. Alors elles se débrouillent, prennent leur deuxième pilier ou leur retraite anticipée et vivent dans la pauvreté. Et parfois, elles sont contraintes de s’expatrier».