Belgique

Le personnel des prisons se croisera les bras aux quatre coins du pays dès 22h00 ce jeudi à l’appel du front commun syndical. Par cette grève de 24 h

Cette nouvelle action intervient d’ailleurs peu après un incident majeur dans une maison d’arrêt d’Anvers, un établissement pénitentiaire où est exécutée la détention préventive. Un détenu a été retrouvé grièvement blessé dans sa cellule mardi soir, après plusieurs jours de sévices. Le parquet a qualifié les faits de tentative d’assassinat, viol et torture. Une enquête a été ouverte. Six personnes étaient incarcérées dans la cellule où la victime de 41 ans a été agressée. Théoriquement, cette cellule n’aurait dû accueillir que trois individus, selon les syndicats. D’après un représentant du syndicat socialiste ACOD/CGSP Prisons à Anvers, ce type de faits « aurait pu arriver dans tout autre établissement pénitentiaire » car le personnel a à peine le temps de contrôler les cellules, entre la distribution de la nourriture, les promenades, l’accueil des visiteurs, des avocats et des médecins, les transferts vers les tribunaux, etc.

L’action de jeudi s’inscrit en outre dans un mouvement de grogne général. En septembre dernier, les prisons de tout le pays s’étaient déjà mises en grève pendant 24 heures pour dénoncer les conditions de détention et de travail « inhumaines » qui y règnent. En janvier, une nouvelle grève de 24 heures avait encore touché les prisons du royaume. Les prisons de Flandre avaient ensuite embrayé avec une semaine d’actions en février.

Un détenu atrocement torturé pendant plusieurs jours dans une prison d’Anvers

Début mars, dix établissements pénitentiaires avaient refusé d’accueillir de nouveaux détenus. Dans la foulée, des concertations ont eu lieu entre les syndicats et le cabinet du ministre de la Justice. Paul Van Tigchelt (Open VLD) avait notamment proposé que les détenus condamnés à des peines maximales de dix ans de prison – à l’exception des condamnations pour terrorisme et infractions sexuelles – puissent effectuer leur peine de façon alternée, en restant un mois en prison puis en sortant de prison durant un mois. Les mesures proposées n’ont cependant pas fait l’unanimité parmi le personnel et les syndicats, qui exigent des solutions à long terme. Le préavis déposé le 2 mars a alors été activé.

« La confiance est faible », relevait ainsi Robby De Kaey, de l’ACOD/CGSP Prisons. « Tant du côté francophone que du côté néerlandophone, la décision d’arrêter le travail est unanime », ajoutait Alain Blancke, du syndicat chrétien ACV/CSC.

Selon les chiffres du Service public fédéral (SPF) Justice, il y avait le 1er mars 12.316 détenus pour 10.743 places, ce qui signifie environ 15% de détenus supplémentaires par rapport à la capacité d’accueil. Un an plus tôt, au 1er mars 2023, on dénombrait 11.402 détenus pour 9.755 places, soit une surpopulation de près de 17%. Début mars, 250 détenus dormaient sur un matelas à même le sol dans les prisons du nord du pays.

Les syndicats souhaitent que, de plus de 12.000 détenus, la population carcérale diminue immédiatement à 10.700 prisonniers. Pour y parvenir, il faut miser sur la surveillance électronique et sur des places supplémentaires en psychiatrie régulière, selon le front commun syndical.

Par ailleurs, l’État belge doit actuellement 2,7 millions d’euros au total d’astreintes à l’Ordre des barreaux francophone et germanophone de Belgique, Avocats.be. Une décision de la cour d’appel de Liège datant de décembre dernier contraint en effet l’État à mettre fin à la surpopulation dans les prisons. Toutefois, rien n’a été entrepris jusqu’à présent, dénonçait Avocats.be lors d’une conférence de presse le 1er mars.