Maroc

La Cour constitutionnelle valide la loi sur la grève malgré quelques réserves

La loi est conforme à la Constitution. C’est le verdict rendu par la Cour constitutionnelle ce jeudi 13 mars 2025, mettant ainsi fin au long débat sur la loi organique 97.15 qui fixe les conditions et modalités d’exercice du droit de grève. Saisie par le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, le 11 février dernier, la Cour a passé le texte au crible avant de rendre sa décision. Avant de se prononcer, elle a échangé avec le président de la Chambre des représentants, Rachid Talbi Alami, ainsi qu’avec plusieurs parlementaires entre le 13 et le 19 février. Si elle a validé l’essentiel du texte, elle a néanmoins émis quelques réserves, pointant la nécessité de préciser certaines dispositions pour garantir une application conforme aux principes constitutionnels.

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Parmi les points nécessitant des ajustements, la Cour a relevé trois articles clés. D’abord, l’article 1, qui définit les principes généraux du droit de grève et son encadrement par les conventions internationales ratifiées par le Maroc. La Cour estime que certaines formulations restent trop floues et doivent être clarifiées. Elle souligne que si le texte rappelle des principes fondamentaux, il ne fixe pas toujours de manière explicite «les conditions et modalités d’exercice du droit de grève», comme l’exige la Constitution. Elle insiste également sur le fait que certaines formulations «ne constituent pas en elles-mêmes des règles normatives», ce qui pourrait poser des problèmes d’application.

Ensuite, l’article 5, qui stipule que toute grève ne respectant pas les conditions fixées par la loi sera considérée comme illicite. La Cour met en garde contre une possible interprétation restrictive de cette disposition et insiste sur le fait que «les textes d’application ne peuvent instituer des conditions ou modalités supplémentaires qui n’auraient pas été fixées par la loi organique elle-même». Une manière de rappeler que toute régulation du droit de grève doit rester dans les limites définies par la loi et ne pas être alourdie par des restrictions ultérieures.

In fine, l’article 12, qui encadre l’organisation d’une grève dans les entreprises où aucun syndicat représentatif n’est présent. La Cour reconnaît la nécessité d’un cadre réglementaire, mais insiste sur l’importance de ne pas entraver l’exercice de ce droit. Elle rappelle que «les modalités fixées ne doivent pas entraver l’organisation effective d’un mouvement de grève par les travailleurs eux-mêmes», et demande donc une précision sur les conditions de sa mise en œuvre. Conformément à la procédure législative, la décision de la Cour sera publiée au Bulletin officiel avant l’entrée en vigueur de la loi, prévue dans un délai de six mois.

Il convient de rappeler que la loi organique 97.15 qui fixe les conditions et modalités d’exercice du droit de grève, présentée par le gouvernement comme une avancée majeure, a connu un parcours législatif mouvementé. Le texte, adopté en décembre 2024 par la Chambre des représentants, puis en février 2025 par la Chambre des conseillers, a été profondément remanié avant d’être soumis à la Cour constitutionnelle. Au total, 218 amendements ont été débattus, certains acceptés, d’autres rejetés, témoignant des tensions entre l’Exécutif, les syndicats et les parlementaires.